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Le Musée « France 40 Véhicules » : une initiative de passionnés

Si la France compte de nombreux musées militaires à travers son territoire, riche il est vrai d’une longue Histoire en la matière, chaque nouvelle implantation est à souligner. Le contexte est toujours délicat concernant notre domaine, touchant l’armement, les véhicules… C’est à la jonction de la Marne et de l’Aisne, dans la ville de Fismes qu’est implanté depuis le 25 juin 2021 le Musée « France 40 Véhicules ».

Une initiative privée

Ce musée et ses expositions sont intégralement dus à une initiative privée, aucune subvention n’ayant été sollicitée. Et force est de reconnaitre que lors de notre visite, nous fûmes particulièrement impressionnés par la qualité de l’ensemble, par l’intérêt des collections présentées et notamment la couverture de cette période de l’avant-guerre côté Français, aux prémices du drame de 39-40. Richement équipé, l’endroit propose dans un cadre historique, nombre de véhicules, d’engins et de matériels particulièrement intéressants et rares, de surcroit dans un musée privé ! Ce projet est porté depuis 2013 : outre les collections il a nécessité l’acquisition du bâtiment actuel. Son lancement a été suivi d’un franc succès : l’objectif des 5000 visiteurs a été dépassé en à peine 8 mois. Il a ainsi su parfaitement réussir son intégration aux autres musées et sites mémoriels de la région.

À la manœuvre, Laurent Vermot-Desroches, un collectionneur passionné par le matériel Français de 1940. Laurent s’intéresse depuis sa jeunesse aux vestiges et reliques historiques de cette période. Comme pour de nombreux passionnés, l’aventure commence par le récit des ainés, par la culture du souvenir et la découverte des premières baïonnettes, casques, etc… Loin de le quitter en grandissant, cette passion ira crescendo et se communiquera également à son fils Robin. Ce dernier est également très actif dans le projet et assure les présences et la gestion opérationnelle du musée.

Ce musée est l’aboutissement de 42 ans de collection personnelle et collective, le projet d’une vie en somme avec de nombreuses années de préparation. Un investissement en temps et en huile de coude avec une vocation éducative, une volonté de ne pas conserver ces témoins historiques hors de portée du public. La réalisation d’un musée n’est pas un acte anodin, vu l’importance du matériel et des accessoires, la question s’est posée rationnellement et c’est la passion qui a initié le projet également immobilier, de réhabilitation et de réalisations techniques.

L’association « France 40 – Véhicules » a été créé dans le cadre de ce projet, elle s’inscrit dans la continuité de l’association « France 40 » plus axée sur la reconstitution historique. Cette nouvelle association intègre une dimension technique et matérielle orientée sur la restauration de véhicules, elle a également permis l’embauche de 3 salariés avec de sérieuses compétences techniques. Une trentaine de membres actifs contribuent à la vie de l’association.

Outre l’organisation et la gestion du musée et des reconstitutions, l’association participe également à des tournages de cinémas en mettant à disposition des matériels roulants. Elle est également à même de restaurer voire de reconstruire des véhicules. C’est notamment le cas avec la restauration d’un char français Renault FT 17 (Photo 02), emblématique de la Première Guerre mondiale, qui est exposé à la Clairière de l’Armistice à Rethondes, ou encore de la reconstruction à l’identique d’un char Schneider du monument national des chars d’assaut de Berry-Au-Bac.

Un site historique pour accueillir les collections

Le site de la Sucrerie qui accueille le musée est un bâtiment emblématique de la ville de Fismes. Édifié en 1872, il fait partie intégrante du patrimoine industriel de la ville. Les bâtiments ont été témoins des vicissitudes de l’Histoire, occupé par les Français, les Allemands et les Américains sur les deux conflits mondiaux. Partiellement détruit et reconstruit, c’est le musée qui a permis sa conservation et sa réhabilitation. Sa démolition avait été envisagée : c’était sans compter sur l’association ayant acquis les lieux en 2015 et qui a œuvré pour sa réparation et surtout sa mise aux normes. À noter que Fismes fut un secteur particulièrement actif lors des derniers conflits mondiaux, ce fut entre autres le point de départ des troupes Françaises vers le Chemin des Dames en 1917.

Le musée offre actuellement un espace de 1000 m² disposé en 2 salles principales. L’ambiance générale du site se prête parfaitement à la thématique du musée, les locaux de la sucrerie sont typiques de l’ère industrielle de la fin du XIXe siècle : brique, acier et piliers forgés. Le résultat est marquant, les visiteurs sont immédiatement replongés dans un environnement évoquant le passé.

Près de 110 mannequins richement équipés entourent des véhicules allant de la bicyclette aux chars, le tout mis en valeur en scénographie et diorama parfaitement crédibles. De vraies scènes historiques reconstituées qui plongent le visiteur dans le cœur de l’action. Les pièces et véhicules à l’état « neuf » côtoient des pièces de récupération venant des batailles proches du lieu de présentation, autant de témoignages saisissant de l’histoire des combats locaux. Dans un souci de détail, ayant leurs importances, les mannequins reçoivent un maquillage différencié et explicite renforçant leurs expressions. Le fil conducteur du musée est de présenter aux visiteurs une représentation fidèle et documentée de l’armée Française en Mai – Juin 1940. Cette période n’est pas toujours mise en avant pour des raisons « historiques » mais également par des soucis de dogmatismes. L’action de ce musée est d’une grande importance pour comprendre un contexte. L’armée Française n’était pas autant en retard qu’ont pu le dire certains observateurs. Certains de ses matériels ayant même servis de base pour des véhicules de l’occupant. C’est aussi rappeler le sacrifice des soldats qui, loin de la représentation de la défaite, se sont battus sans retenue pour ralentir l’avancée Allemande. Le nombre de morts par jour parle de lui-même : autant si ce n’est pas plus que dans les premiers mois de la Première Guerre mondiale. Les civils sont aussi représentés dans le musée,  l’exode, mais aussi des souvenirs de captivité et de la vie courante.

Quelques exemples illustrant le travail de reconstruction ou de restauration et de mise en valeur :

Le char R35

Un char Français R35 est parfaitement mis en valeur dans l’une des scènes, rare dans les musées ce modèle l’est encore plus dans une collection particulière (Photos 09 à 11). Le R35 est le digne successeur du FT17 emblématique de la Première Guerre mondiale, léger, il est biplace et doté d’un canon de 37 mm et d’une mitrailleuse Reibel. Sa doctrine d’emploi sera d’accompagner l’infanterie, suivant les préceptes d’une guerre passée. Le modèle présenté, fonctionnel, a été entièrement restauré, illustrant si nécessaire les compétences de l’équipe. Ce char avait, après-guerre, été modifié en grue et dépouillé de la plupart de ses éléments. Il a été entièrement démonté puis restauré en conformité du modèle initial. À noter que la partie supérieure blindée a été reproduite à l’identique en fonderie, une belle pièce d’une tonne ! Les milliers d’heures de travail en font une pièce unique, son volet avant est ouvert et permet ainsi au public de visualiser l’intérieur du char, ses râteliers à obus de 37 mm et tambours de Reibel.

Le canon de 47 mm

Un magnifique canon de 47 mm SA37 de 1937 est présenté avec ses 3 servants (Photos 12 et 13). Cette pièce d’une portée de 2000 m trouve ses origines dans le canon de Marine 1885-1902. Modernisé en 1934, il équipera notamment les protections de la ligne Maginot. En 1940, employé par l’infanterie, ce sera l’un des meilleurs canons antichars de sa génération permettant de percer la plupart des blindages. Comme de nombreux autres équipements, l’armée Allemande réutilisera cette arme.

L’infirmerie

Un hommage est aussi rendu au service de santé des armées sous forme d’un diorama réaliste (Photo 16). Souvent en première ligne, ces personnels, médecins et infirmières se sont parfois sacrifiés dans l’exercice de leurs missions. La campagne de 1940 a été violente et meurtrière, tant par les forces en présence que par la rapidité des opérations. Dans l’esprit commun, la bataille de Verdun en 1916 reste « La » référence, avec 2000 personnes mises hors de combat par jour. La campagne de 1940 a compté jusqu’à 9200 combattants hors d’état de combattre…

Le Poste de Commandement (PC) reconstitué

Un poste de commandement a été précisément reconstitué, comme souvent à cette période, organisé au sein d’une habitation civile (Photo 17). Il s’agit du PC de la 44ème division d’infanterie du général Boisseau. Pièce essentielle de l’organisation des opérations, le commandement a souvent servi de bouc émissaire à la défaite générale. Si des erreurs et failles sont réelles et documentées, il ne faut cependant pas les décontextualiser. Devant la violence du choc et la rapidité de l’avance Allemande, les PC pouvaient se déplacer jusqu’à trois fois dans une journée…

L’épicerie

Une magnifique reconstitution d’une épicerie de province est réalisée, avec un réalisme étonnant le tout dans une mise en scène d’exode (Photos 18 et 19). Le public peut « rentrer » dans le décor via un accès et admirer la vitrine richement achalandée de produits d’époque. Certains de ces produits ont de nos jours disparus, mais d’autres sont encore bien actuels !

En conclusion

Les projets ne manquent pas et les équipes sont déjà mobilisées, c’est notamment l’agencement d’un espace de 150 m² consacré à l’accueil des groupes dans un environnement et des décors reconstitués. Une aire de 300 m² sera consacrée à la vie des civils sous l’occupation et la libération. L’étage de 600 m² accueillera une salle dédiée à la Première Guerre mondiale, avec un focus sur les combats urbains de Fismes en 1918.

Le « Musée France 40 Véhicules » mérite une visite, parfaitement agencé et présentant des matériels rares, il s’inscrit dans une vocation « locale », une quinzaine de kilomètres autour de Fismes, ce qui donne encore plus de valeur ajoutée à l’exposition, loin des contenus aseptisés de certains musées.

Julien Lucot

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L’adresse :

Musée France 40 Véhicules
7, rue de la Sucrerie
51170 Fismes (Marne)

Ouvert du mardi au samedi de 10h à 12h, 14h à 18h.
Visites guidées à 10h30, 14h30 et 16h30.

Site web

https://www.museefrance40v.fr/

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    *Nous aussi nous détestons les spams

    Julien Lucot

    Julien Lucot est amateur d'armes éclairé et un tireur Français qui à écrit de nombreux articles dans la presse française des armes à feu. Enthousiaste et ouvert d'esprit, sa soif de découverte n'a d'égale que sa joie de partager.

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