FAMAS, présentation du Bullpup français
En complément de l’article de Pierre Breuvart sur le FAMAS, qui revient sur plus de 40 ans de service du fusil d’assaut réglementaire français, nous allons réaliser ici la présentation technique et organisationnelle de l’arme. Nous nous intéresserons ici aux deux variantes les plus communément rencontrées : le F1 en service dans les armées de Terre, de l’Air et la Gendarmerie et le G2, plus particulièrement destiné à l’export et employé par la Marine Nationale (Photos 01 à 05). Notre exemplaire d’étude du G2, destiné à l’export, est cependant différent du modèle en service dans la Marine par plusieurs aspects sur lesquels nous reviendrons au cours de cette étude. Nous utiliserons dans cet exercice l’acronyme « FAMAS » pour « Fusil d’Assaut de la Manufacture d’Armes de Saint-Étienne », car c’est l’acronyme employé dans les TTA-150, c’est-à-dire la série de manuels réglementaires Français. On rencontre cependant, dans d’autres documents de source officielle, l’utilisation du sigle FA-MAS.
Une construction originale pour une arme de 1979
L’arme est construite autour d’un boîtier de culasse en aluminium, qui est prolongé par un « tube-enveloppe » en acier (Photos 06 et 07). Ce tube-enveloppe fait bien partie de la carcasse de l’arme. Ce dernier enveloppe bien évidemment le canon sur sa portion arrière, sans le toucher, et permet ainsi l’installation de différents dispositifs de l’arme sans interagir avec ce dernier (Photo 08). Il accueille ainsi :
- Le levier d’armement et le ressort récupérateur de l’ensemble mobile (ce dernier captif dans un tube dûment graissé !)
- Le point d’ancrage avant de la « Poignée Garde-Main » (« PGM » pour les intimes, ce qui n’a rien à voir avec une marque de fusil de précision…)
- Le point d’ancrage avant du fût (le point d’ancrage arrière étant réalisé dans la carcasse en aluminium).
- La tourelle de l’œilleton , qui sert aussi de point d’ancrage arrière de la PGM.
Cette spécificité du tube-enveloppe est à notre connaissance « unique » sur une arme d’assaut. Il pourrait faire penser à un manchon de protection de canon (souvent perforé) que l’on peut rencontrer sur de nombreux PM (du MP-18/I au Sterling !) ou même fusils (du Gewehr 1888 au Stg-57…) mais n’a clairement pas ici le même rôle. Le tube-enveloppe du FAMAS comporte un vrai rôle structurel alors qu’un manchon de protection du canon, se limite bien souvent à éviter l’interaction du canon avec son environnement (tireur compris !). On peut le rapprocher dans l’esprit du tube de levier d’armement du G3 et de sa descendance (HK-33, MP-5…), qui permet, lui aussi, l’installation du garde-main sans interférence avec le canon. Ce qui fait que les deux armes, font parties des rares armes d’assaut dont le canon est réellement « flottant ». Toutefois il est nécessaire de préciser ici que toutes les productions de G3 ne reproduisent pas cette spécificité : vraisemblablement les productions HK précoce et dans tous les cas, certaines productions militaires pakistanaises « POF » que nous avons eu l’opportunité d’examiner.
Le canon du FAMAS, martelé à froid, est vissé dans la carcasse en aluminium. Une rondelle, d’épaisseur variable, permet à l’aide d’un écrou vissé à l’intérieur du tube-enveloppe le réglage de la feuillureDistance entre la surface d'appui arrière de la munition (d... More, appelée « côte d’en-culassage » dans le jargon militaire, car concernant une arme à culasse non calé. Le canon du FAMAS F1 est originellement destiné à tirer la munition F1, qui est de type M193 (3,5 g). Il a donc un pas de rayure de 1 :305mm (1 :12 pouces). Les premières productions de canon sont originellement dotées de six rayures et les versions plus tardives n’en compteront que trois. Le canon du G2 permet le tir de la munition SS-109 (4 g), avec pas de rayure de 1 :229 mm (1 :9 pouces). Comme les versions tardives du F1, le canon de notre G2 d’étude compte trois rayures. Le canon qui accueille la tourelle porte-guidon se termine par un cache-flamme. Les versions en dotation dans l’Armée Française se voient dotées d’une bague de réglage de la valeur d’enfoncement des grenades à fusil…mais nous reviendrons sur cette dernière disposition ultérieurement. Sa chambre est cannelée pour éviter, par adduction du carbone sur la jupe, les collages d’étuis (Photo 09). Contrairement à beaucoup d’autres productions militaires, son canon n’est pas chromé. Une fois encore, le martelage à froid et l’absence de chromage sont des aspects techniques partagés avec la famille G3…
Le boîtier de culasse accueille également le puits et le crochet de chargeur, ainsi que le logement du « boîtier de mécanisme », qui contient le système de mise à feu. Ce dernier constitue d’ailleurs la « pièce de sécurité » de l’arme, c’est-à-dire la pièce à retirer pour rendre l’arme inopérante.
L’arme est habillée par une crosse (à l’arrière), un fût (en dessous) et la PGM (au-dessus). Sur le FAMAS-F1, ces trois éléments ont été réalisés à minima en deux types de matériaux synthétiques différents au cours du temps. Le plus ancien, fortement chargé en fibre de verre, est gris de nature. Ces pièces étaient donc peintes en noire (Photo 07). Cette matière a laissé la place à un polymère (toujours chargé de fibre de verre) plus « classique » de nos jours, dont la teinture est réalisée dans la masse. C’est cette matière que nous retrouvons sur le FAMAS-G2. Si la crosse et la PGM peuvent (et doivent) être démontées pour l’entretien courant, le fût, lui reste captif sur l’arme et ne se dépose qu’en atelier dûment équipé. Ce dernier point peut paraître un peu préjudiciable pour l’entretien de l’arme. Il est cependant rendu totalement nécessaire par l’organisation « bullpup » de l’arme, car sa dépose impliquerait le retrait de la tringle de liaison de la détente, opération plutôt délicate et peu envisageable sur le terrain. Enfin, l’accessibilité pour le nettoyage reste « acceptable » sur cette partie, surtout compte tenu du fait que celle-ci ne s’encrasse pas par le tir, mais uniquement par la contamination environnementale. Ce type de salissure est généralement bien plus aisé à retirer que la calamine issue des tirs. Aussi, cet ensemble ne compte que peu de pièces mobiles et qui sont peu sensibles à l’encrassement : la détente, la tringle de liaison et sélecteur de tir. Le fût du modèle F1 et G2 comporte deux différences ergonomiques notables :
- Le pontet : en tôle sur le F1, il englobe seulement le doigt de la détente. Moulé avec le reste du fût sur le G2, il protège la main dans son intégralité.
- Le garde-main inférieur : celui du G2 comporte un rebord en sa position avant qui est destiné à éviter de dépasser le fût avec la main.
Cet ensemble carcasse, canon et fût, indémontable pour le soldat est réglementairement désigné « corps du fusil ».
La PGM, outre sa fonction de transport, constitue une formidable protection pour les organes de visée. Elle accueille également les organes de visées pour le tir à la grenade (nous détaillerons ces dispositifs plus loin) ainsi que le bipied. Quand cette PGM est assemblée sur l’arme, elle est encastrée sur un point d’ancrage du tube-enveloppe à l’avant, et verrouillée par une goupille d’assemblage à l’arrière sur la tourelle de l’œilleton . Ainsi solidarisée sur le tube-enveloppe, elle n’interfère à aucun moment avec le canon, qui comme évoqué, est toujours flottant : en tir à bras franc, sur appui ou depuis un bipied. La PGM ne disposant pas d’une rigidité suffisante pour l’installation d’une aide à la visée optique ou optronique, il fût donc conçu plus tardivement face à ce besoin une « PGMP, c’est-à-dire une « Poigné Garde Main Polyvalente » dotée de différentes interfaces de montage pour aide à la visée, laser y compris (Photos 10, 11 et 12). Cette dernière incorpore une structure métallique permettant le montage d’une optique sur une interface rigide et sans jeu. Ceci n’empêcha pas quelques « petits malins » (mais qui, dans le cas d’une arme de guerre, peuvent être qualifiés, de malfaiteurs compte tenu des conséquences pour l’homme de terrain) de proposer des solutions de montages pour aide à la visée sur la PGM originelle. Ces systèmes ne donnent pas la moindre satisfaction en terme de précision…test réalisé par des professionnels indépendants à l’appui si cela était nécessaire. Oui, on parle bien de montage optique réalisé à des fins professionnelles, intégralement monté sur une structure en matière synthétique souple assemblé sur l’arme avec un jeu non négligeable. Pour ceux qui auraient un doute, le montage d’une optique est normalement serré, sans souplesse et sans jeu…C’est d’ailleurs ce que propose, la PGMP. Le FAMAS équipé d’une PGMP est réglementairement dénommé « FAMAS Infanterie ».
La crosse dispose dans son renflement arrière supérieur d’un amortisseur de culasse conséquent, liée au principe moteur bien particulier du FAMAS : la culasse non-calée avec artifice de démultiplication (Photos 13 et 14) … aspect abordé au point suivant. On retrouve, une fois de plus une similarité avec le G3, qui possède aussi un amortisseur de culasse conséquent…et dont le modèle varie en fonction de la durée de vie recherchée pour l’arme! La fenêtre d’éjection est découpée sur chaque côté de la crosse : elle peut être obturée du côté désiré par un appui-joue qui se clipse aisément (Photos 15 à 17). La plaque de couche en caoutchouc comporte un dessin avec des points antidérapants (les fameux 16 points du FAMAS, pour reprendre une boutade potache, et disons-le, d’un goût douteux que certains ont expérimenté durant leur passage dans l’armée…). La plaque de couche de G2 est aussi en caoutchouc, mais présente de larges bandes antidérapantes (Photo 18). On peut d’ailleurs noter que lorsque l’arme est assemblée, le boîtier de culasse prend directement appui sur la plaque de couche, ne transmettant ainsi aucun stress au reste de la crosse.
LAI : Levier Amplificateur d’Inertie
L’ensemble mobile circule sur deux rails usinés dans le boîtier de culasse en aluminium (Photo 19). Son guidage est complété par le tube du ressort récupérateur, lié à l’ensemble mobile par une goupille captive installé sur la masse additionnelle. Cet ensemble mobile est notamment composé d’une culasse, d’une masse additionnelle et du « Levier Amplificateur d’Inertie » …ou L.A.I. qui a donné son nom à notre site internet (Photo 20) ! Le principe de moteur de l’arme est donc celui de la culasse non-calée avec artifice de démultiplication. Ce type de système est régulièrement appelé « culasse non-calée avec retard à l’ouverture », ce qui n’a pas vraiment de sens : toutes les armes recourent à un système de retard à l’ouverture…je vous renvoie au chapitre 6 de mon ouvrage pour plus de détail. Dans ce type de système, l’impulsion de réarmement est directement transmise à l’ensemble mobile par le recul de l’étui dans la chambre au moment du tir.
L’artifice de démultiplication employé ici est le levier. Lors de la mise à feu, la culasse, poussée par l’étui, prend appui sur le bras court d’un levier en « L » qui est calé dans le boitier de culasse sur un « coin d’appui » rapporté en acier. Le bras long du levier prend appui sur la masse additionnelle. Ainsi, le rapport de longueur génère un avantage mécanique pour la masse additionnelle qui voit son « inertie » être « amplifiée » (d’un facteur de 3,6 fois comme indiqué dans le manuel règlementaire TTA-150), c’est-à-dire l’effort nécessaire pour la mettre en mouvement, être multiplié. Cet artifice permet, à l’aide d’un ensemble mobile non-calé dont la masse additionnelle pèse seulement 242 g, de simuler la présence d’une culasse de près d’un kilo (toutes masses comprises). Ce système fût à notre connaissance utilisé en premier lieu par les armes de l’inventeur Hongrois Pál Király, qui conçut entre les deux guerres, sur ce principe les PM Danuvia 39M et 43M en Hongrie et même, après la Seconde Guerre mondiale, la carabine « San Cristobal » en calibre .30 Carbine en république Dominicaine. Nous ne savons pas si ce système, déjà employé dans l’armée Française sur la FM AA-52 (appelé alors de manière moins précise « Levier de Retard à l’Ouverture » ou « LRO »), fût copié sur les armes de l’inventeur Hongrois ou plutôt « réinventé ». Il reste avant tout, une solution mathématique et physique à un problème récurrent. Notons également que certaines sources stipulent que ce système aurait été breveté de façon antérieure par l’américain John Pedersen : cependant, nous ne connaissons aucun document et aucune arme qui appuient ces dires. Précisons ici que nos connaissances ne sont pas absolues…
Lors du tir, le temps que cet artifice de multiplication soit mis en œuvre, le projectile quitte le canon. Dès lors, le mécanisme ainsi impulsé se réarme sur son inertie, avec une vitesse d’autant plus considérable que si celle de la culasse a été freinée par l’artifice, celle de la masse additionnelle, désormais motrice, a été amplifiée. Ceci explique une cadence de tir élevée (de l’ordre des 1000 coups minutes) et la nécessité de la présence de l’amortisseur dans la crosse, qui est également dotée d’un levier qui permet sur une courte distance, un amortissement graduel du choc violent. La nécessité de cet amortisseur est d’autant plus grande que l’arme se veut compacte : sur un G3, la course de l’ensemble mobile est beaucoup plus longue, notamment dans un but d’amorti… Ici, la conception bullpup de l’arme, compact par nature, interdit ce recours. Lors du retour en batterie, l’amortisseur agit également comme une « catapulte » sur l’ensemble mobile, en accélérant son mouvement avant en plus du ressort récupérateur.
On peut ajouter ici que le LAI constitue l’organe central de la sécurité de l’arme :
- Il commande la gâchette de tir automatique, qui, même en mode coup par coup, n’autorise l’abattement du chien que si l’ensemble mobile est en position de fermeture. Cette disposition est réalisée par le placement de la commande de la gâchette de tir automatique en fond de logement du LAI dans le boîtier de culasse (Photos 21 et 22).
- L’interaction du LAI avec le percuteur permet deux choses : il interdit la saillie du percuteur tant que l’ensemble mobile n’est pas en position de fermeture et il génère l’extraction mécanique du percuteur à l’ouverture (Photo 23).
De plus, si la culasse porte le percuteur (et non comme sur d’autres armes, le transporteur de culasse qui est ici en réalité la masse additionnelle), le télescopage de la culasse dans la masse additionnelle interdit l’accès du percuteur au chien tant que l’ensemble mobile n’est pas en position de fermeture (Photo 21). Classique, mais efficace.
Ces dispositions mettent l’arme à l’abri d’un départ de coup avec une culasse ouverte dans des conditions normales d’utilisation.
La culasse présente l’originalité de voir la latéralité de l’éjection être changée sans le moindre remplacement de pièce, chose inédite à cette époque à notre connaissance (qui n’est pas absolue, rappelons-le !) (Photos 24 à 27). Pour ce faire, il est possible de déposer la cuvette de tirLa cuvette de tir est la partie de la culasse qui accueille ... More (appelée réglementairement « tête amovible ») par le simple retrait d’une goupille nommée « doigt de maintient « située sur le dessus de la culasse. L’extraction de la cuvette de tirLa cuvette de tir est la partie de la culasse qui accueille ... More (assistée par le ressort d’éjecteur) libère :
- L’extracteur et son ressort
- L’éjecteur et son ressort
- L’obturateur : une pièce qui vient combler le vide du côté de la culasse qui n’est pas occupé par l’extracteur
Le changement de latéralité est réalisé en remontant l’ensemble, mais en inversant la place de l’extracteur et de l’obturateur. On n’oubliera pas de changer aussi la latéralité de l’appui-joue, qui obstrue la fenêtre d’éjection du côté « visage » du tireur. On peut donc ainsi, sur le terrain et en quelques minutes, convertir la latéralité de l’arme, chose généralement nécessaire pour une arme bullpup, au risque de voire l’utilisateur être blessé par l’éjection de la douille. Cela dit, il ne faut pas confondre les choses : l’arme n’est pas « ambidextre », mais bien « convertible en latéralité ». Une arme ambidextre peut être indifféremment être utilisée par un tireur droitier ou gaucher sans modification. L’article de Pierre revient plus en détail sur les considérations opérationnelles de l’arme.
La chose nous paraît intéressante sur un second point : elle apporte au niveau du soldat, une capacité de maintenance sur ces pièces, qui sont souvent les plus sollicitées dans une arme. Ici, le parallèle ne se fait pas avec le G3, mais bien avec le système Kalashnikov (culasse intégralement démontable au niveau utilisateur) et dans une moindre mesure, avec les système AR-15 où seul l’extracteur peut (et en réalité doit) être démonté pour l’entretien de l’arme. Notons à cet égard, l’importance de nettoyer et de lubrifier ces pièces : nous avons pu observer dans de nombreuses autres armes ayant recours à des sous-ensembles (extracteur, éjecteur à ressort) indémontables, un encrassement et le développement d’une oxydation particulièrement néfaste au bon fonctionnement de l’arme. Dans ces sous-ensembles indémontables, l’utilisateur consciencieux n’a d’autre choix que de « saturer » de lubrifiant puis d’éponger l’excédent afin de minimiser les méfaits de l’encrassement et le risque d’oxydation. C’est un palliatif nécessaire, mais un palliatif tout de même… Dans le cas du FAMAS, aucun problème : tout est accessible !
Anecdote amusante, la morphologie particulière de la face avant de la culasse du FAMAS lui vaut d’être couramment appelé par les militaires Français la « tête de Mickey » !
On note au passage, que la cuvette de tirLa cuvette de tir est la partie de la culasse qui accueille ... More du FAMAS, propose une surface d’appui total pour le culot de la munition, un point positif en terme de solidité. Ainsi, en cas de surpression, le culot ne peut refluer en aucun endroit de façon significative et notamment en aucune façon sous l’extracteur.
La culasse du FAMAS G2 est similaire, mais l’arme comporte cependant un système de détrompage qui empêche le montage d’une culasse de type F1 sur un FAMAS G2. Ce système de détrompage est composé d’une surépaisseur triangulaire réalisée sur le coin d’appui qui nécessite un rainurage de la surface inférieure de la culasse (Photos 28, 29 et 30). Si le but exact de ce détrompage ne nous est pas formellement connu, il y a fort à parier que cela soit en rapport avec l’emploi du chargeur de type AR-15 (M16). En effet, la culasse comporte un usinage différent, qui permet le passage des lèvres du chargeur du AR-15, plus haute que celle du FAMAS F1 (Photos 31 et 32).
Une organisation atypique en 1979.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’organisation de l’arme dénotait quelque peu dans le paysage armurier réglementaire de 1979. Non seulement la construction bullpup n’était pas la plus répandue, mais également parce que les commandes de l’arme peuvent présenter pour certains utilisateurs quelques bizarreries. Le levier d’armement pourrait immédiatement être pris comme exemple. Celui-ci est situé à l’intérieur de la PGM. Il est solidaire de l’ensemble mobile lors du tir et se déplace donc avec lui. Si certains peuvent y voir un inconvénient sécuritaire, celui-ci permet en tout cas de pousser la fermeture…bien que cette manœuvre soit rarement judicieuse de notre point de vue. En position avant, il possède un mécanisme de rétention (qualifié « d’arrêt » réglementairement) qui évite une mise en œuvre incomplète et accidentelle (choc, accrochage parasite…) (Photos 33 et 34). Ce mécanisme de rétention, d’une force considérable, est sans doute également responsable de l’absence de rebond (du moins, visible) de l’ensemble mobile à la fermeture. L’accès au levier d’armement est finalement confortable tant pour un tireur droitier que gaucher et ceci dans toutes les positions (allongée, debout…). Ce levier d’armement n’est finalement pas sans rappeler celui originellement implanté sur l’AR-10 !
L’organisation du choix du mode de tir peut également surprendre, du moins sur les armes dotées de la rafale de 3 coups, qui sont les plus largement répandues par le biais des F1 et G2 en service dans l’armée Française. On notera cependant que ce n’est pas le cas de l’exemplaire de G2 de cette étude, ni des premiers exemplaires du F1 distribués, mais qui ont été rétrofités depuis. Dans le cas des armes dotées de la rafale de 3 coups, le choix du mode de tir se fait par le biais de deux commandes :
- Une à l’intérieur du pontet qui permet la mise en sureté de l’arme (position centrale) ou le passage en coup par coup (position de droite) ou enfin en mode automatique (position de gauche). Cette commande constitue le « sélecteur de tir » (Photos 35 et 36).
- Une située sur la partie inférieure du boîtier de mécanisme qui permet de déterminer le type de rafale (libre à l’avant ou limitée à trois coups à l’arrière). Cette commande constitue le « sélecteur de rafale » (Photos 37 et 38).
Si le sélecteur de tir a bien vocation à être manipulé fréquemment, ce n’est certainement pas le cas du sélecteur de rafale, qui serait plutôt du type « select and forget »…pour détourner une terminologie de nos camarades missiliers. Si cette répartition n’est ni aberrante, ni préjudiciable à l’emploi, il ne nous parait pas exclu que sa raison d’être soit d’origine « architecturale ». En effet, les commandes de tir sur une arme bullpup sont déportées à l’avant de l’arme et, par conséquent, à l’avant du mécanisme de mise à feu. Ainsi, chaque commande nécessite potentiellement une longue tringle de liaison. Aussi, par souci de simplification, la chose est ici intelligemment pensée. À l’instar des fusils de la famille de HK G3, la mise à feu en rafale est assurée par un étagement de la course de la détente :
- Un premier seuil permet l’effacement de la gâchette commandée et provoque ainsi, le départ du coup par abattement du chien sur le percuteur. Au moment où la gâchette est désengagée du cran d’armé, la pièce de commande de la gâchette (tractée par la tringle liée à la détente) libère la gâchette. Cette dernière, sous l’action d’un ressort, reprend alors son contact avec le chien. On dit que la gâchette commandée est « déconnectée ». Ainsi, lorsque le chien suit l’ensemble dans son mouvement avant, son cran d’armé est accroché par la gâchette commandée avant même d’être accroché par la commande tir automatique (nous reviendrons sur cette dernière). Pour réinitialiser le système de mise à feu, il est nécessaire de relâcher la détente afin que la pièce de commande de la gâchette se repositionne en amont de celle-ci.
- En continuant la course de la détente, un second seuil permet d’effacer de façon continue la gâchette commandée par la pièce de commande tant que le doigt presse la détente. Ceci est possible, car en continuant sa course vers l’avant, la pièce de commande trouve un nouveau point d’appui sur la gâchette commandée. Dès lors, l’abattement du chien est réalisé à chaque fermeture de l’ensemble mobile par le biais de la commande de tir automatique qui est actionnée par la mise en place du LAI : l’arme tire en rafale.
Ainsi, l’action sur une course partielle de la détente produit un départ en coup par coup, et une action complète de la course de la détente produit un tir en rafale. Dès lors, le rôle du sélecteur pour déterminer le tir semi-automatique ou automatique peut se limiter à brider la course de la détente…C’est rigoureusement le cas sur le FAMAS, mais aussi si d’autres armes bullpup. Si les premiers Steyr AUG se contentent de cet étagement de la course de la détente pour contrôler le mode de tir, les modèles dotés d’un sélecteur ainsi que les armes de la FN qui en reprennent le mécanisme de mise à feu du Steyr AUG (FN P90 et FN 2000) utilisent ce même principe. Le problème est alors de relayer la commande de la rafale de 3 coups, qui ne fonctionne rigoureusement pas sur cette partie du mécanisme de mise à feu. Dès lors, l’intégration en « deux » sélecteurs est beaucoup plus simple, surtout que comme déjà évoqué, c’est finalement peu préjudiciable pour l’utilisateur. On peut compléter ici par le fait que l’utilisation de détente étagée pour le choix du mode tir se retrouve également sur d’autres armes plus « classiques » comme le PM Polonais Wz-63…et que l’utilisation en deux sélecteurs se trouve également sur une autre arme polonaise : le fusil d’assaut Wz-88 Tantal (article en lien ici).
Le sélecteur de tir bride ainsi l’action de la détente : l’immobilisant en mode « sûreté », autorisant une course partielle en « coup par coup » et autorisant sa course complète en rafale (Photo 39). Le sélecteur de rafale, lui, travaille en prise directe sur le boîtier de mécanisme et enclenche un dispositif de comptage du mouvement du chien, qui après trois cycles interrompt le tir par l’engagement d’une gâchette dédiée (Photos 40 et 41). Ce dispositif de comptage est une roue à rochet dont la mise en mouvement est assurée par la tige-guide du ressort de chien. Au terme de trois cycles de chien (donc, trois tirs), une gâchette dédiée s’engage dans un cran du chien. Cette gâchette dédiée est désengagée par le « déclicteur », une pièce qui est commandée par le relâchement de la détente et le retour de la tringle de liaison.
Le pontet peut se débrayer très simplement vers l’avant : on joue sur l’élasticité de sa tôle pour le désengager de son pion de verrouillage à l’arrière et on le fait pivoter à 180° vers l’avant. On peut ainsi tirer à l’aide de gants d’hivers et même si désiré, à l’aide de moufles. Le pontet du G2, moulé avec le fût est large et englobe la main entière et non l’index uniquement comme déjà mentionné (Photos 42 et 43).
La poignée pistolet, rapportée sur le F1 mais coulée dans la masse du fût sur le G2, contient dans les deux cas une burette contenant l’excellente huile S-758 (Photo 44) ! Du moins, excellente pour les armes…nous ne sommes pas médecin et, par conséquent, nous ne pouvons pas dire si elle guérit du Covid…mais comme pour une majeure partie des produits chimiques, nous en doutons !
L’introduction du chargeur se fait « droite », le verrou de chargeur étant positionné vers l’avant sur la version « F1 » et sur le côté droit sur la version « G2 » (Photos 45 et 46). Si le chargeur de la version F1 est « propriétaire », celui de la version G2 est de type AR-15 (Photo 47). Dans les deux cas le stockage de munitions est réalisé sur 2 colonnes, et la présentation des munitions se fait de manière alternée. Le chargeur du G2 examiné et qui semble avoir été livrée avec l’arme par le GIAT, est un chargeur de fabrication FN originellement fourni avec le FNC ou la Minimi. La position du crochet de chargeur sur la version F1 est bien évidemment à mettre en rapport avec deux aspects de l’arme : sa nature bullpup et sa convertibilité pour droitier et gaucher. Sa mise en œuvre est finalement simple, le crochet peut être appuyé par l’index de la main qui agrippe le chargeur, comme quand on presse une détente. Peu proéminent, on est à l’abri des décrochages intempestifs…pour la version F1 ! La version G2 reprend les avantages et les inconvénients que l’on peut attribuer au crochet chargeur de type « bouton-poussoir » …qui n’a clairement pas notre faveur. De plus, pour le G2, le bouton hérité de l’AR-15 n’est pas convertible en latéralité. Paradoxalement, son utilisation par un tireur gaucher et sans doute plus aisé que pour un tireur droitier !
Un talon d’Achille ?
Si l’on en croit certains retours, le talon d’Achille du FAMAS-F1 serait son chargeur. Le sujet est évoqué plus amplement dans l’article de Pierre, nous ne nous attarderons par conséquent pas trop dessus. Celui-ci est droit et voit par conséquent sa capacité être limitée à 25 coups. Le guidage de la munition est un héritage du FSA MAS 49/56 : à l’avant au niveau de l’ogive et à l’arrière au niveau du culot et du début de la jupe. Curiosité, le chargeur tout entier semble être un portage de celui du FAL ! Si les ressemblances sont troublantes, elles ne sont en réalité que peu surprenantes : le chargeur du MAS-62 était déjà très proche de celui du FAL. Le chargeur du FAL étant lui-même très proche de celui du BAR 1918…bref, rien de nouveau (Photos 48 et 49). Ce type de guidage marque néanmoins une différence prononcée par rapport au guidage réalisé sur les autres armes rencontrées fréquemment, où le guidage est réalisé principalement sur la jupe de la munition, comme sur celui d’un AR-15 ou d’une Kalashnikov (Photo 50). Si ce chargeur est réputé fragile : la question n’est-elle pas plus liée à une politique de maintenance appliquée, finalement peu conforme à celle préconisée à l’adoption de l’arme, à savoir celle d’un chargeur quasi « consommable » ? Le fait est que le problème de chargeur reste la principale source de dysfonctionnement de l’arme…une fois du plus, l’article de Pierre vous en dit plus (Photo 51)! Enfin, on peut souligner ici que les chargeurs de type AR-15, rencontrent eux aussi, en fonction des fabrications (mais notamment sur des fabrications à destination réglementaire) des problèmes de fiabilité et de viabilité non négligeables.
Enfin, ni le F1, ni le G2 ne sont dotés d’un arrêtoir de culasse, chose peu surprenante pour une arme à vocation guerrière alimentée par chargeur interchangeable…je renvoie encore une fois les lecteurs intéressés par le sujet au chapitre 6 du « Petit Guide de l’Armement » de votre serviteur, disponible sur ce même site. On peut tout de même se féliciter ici, que pendant un temps, les décideurs aient su encore garder la tête froide face aux légendes urbaines et autres effets de mode…la fiabilité d’abord !
Les organes de visées
Sur le FAMAS F1 originel, ils méritent bien en « s », car ils sont au nombre de trois ! Un dispositif pour le tir à balle, et deux pour le tir de grenade à fusil. L’occasion de rappeler ici qu’en effet, le tir de la grenade à fusil, culturellement très implanté en France depuis la Première Guerre mondiale, fait bien partie des missions première de l’arme. Notre exemplaire de FAMAS G2 ne conserve que des organes de visée dédiés au tir à balle. Les G2 de la Marine conservent l’alidade de tir « verticale » décrit ci-après.
Les organes de visée mécanique dédiés au tir à balle comprennent un œilleton doté de deux « volets » rabattables de diamètre différents, montés sur un anneau large et un guidon fin (Photos 52 à 55). Le volet le plus fin est dit « de précision », le plus large est dit « de cadrage ». La configuration de tir « normale » (comprendre ici, par bonne condition de visibilité) se fait les deux volets relevés, pour un maximum de précision. On peut rabattre le volet de précision par de moins bonnes conditions de luminosité, mais bien évidemment, au détriment de la précision. Le choix des volets ne fait en aucun cas varier la distance d’engagement. Pour le tir par basse condition de visibilité la base de l’alidade de tir tendu à la grenade comportait un cran de mire luminescent et le guidon pouvait être escamoté par un guidon lui aussi luminescent. Cependant, ces dispositifs ont été retirés des armes en service, car contenant du tritium. Pour employer ces organes de visée, il était nécessaire d’abaisser les deux volets : la visée était ainsi réalisée par l’ensemble cran de mire / guidon luminescent visible à travers l’anneau large. Le guidon est installé sur une tourelle solidaire du canon (Photo 56). Il est réglable sans outil en direction, une graduation aidant l’opération. L’œilleton est installé sur une tourelle solidaire du tube-enveloppe (Photo 57). L’œilleton permet sans outil le réglage en hauteur de l’arme par le biais d’une molette dotée d’une numérotation de repère (orientée vers l’avant de l’arme), mais qui n’est en aucun cas liée à des distances. Pour la mise en œuvre du réglage des organes de visée, il est nécessaire de déposer la PGM. L’œilleton de notre G2 reprend les mêmes dispositions (à l’exception de la réglette de réglage du guidon sur notre exemplaire), mais dispose en plus d’un réglage en distance à 3 positions (3, 4 et 5 hectomètres soit 300, 400 et 500 m) par le biais d’une molette située à la base de la tourelle (Photo 58). Celle-ci n’agit pas comme une vis, mais comme une came : le fait de faire un tour complet ne permet pas d’engager plus loin qu’a 500 m. La mise en œuvre de ce dispositif nous paraît peu aisée, notamment avec des gants ou des doigts engourdis par le froid. Cependant, cette capacité nous paraît bienvenue : l’engagement au-delà de 300 m en 5,56 nous paraît être parfaitement exploitable d’un point de vue opérationnel, aussi s’en priver nous paraît dommageable.
La PGM portait donc originellement une alidade rabattable de tir tendu (dit tir « direct ») de la grenade à fusil dont la base servait donc de cran de mire luminescent pour le tir à balle (Photos 59 et 60). Une fois déployé, le cran de mire de l’alidade peut s’engager sur deux positions : 75 et 100 m. Il s’emploie avec le guidon de l’arme, la prise de visée s’effectuant au-dessus de l’oeilleton dédié au tir à balle. La présence de cet organe de visée explique la présence du trou sur le côté gauche de la PGM. Il n’a donc rien d’ésotérique ! Il semble que ce dispositif n’ait jamais été installé sur la version G2 où le tir tendu à la grenade à fusil semble se faire par d’autres moyens (tir au jugé ou à l’aide des organes de visée dédiés au tir à balle ?) qui ne nous est pas connu.
À l’intérieur dans la PGM, une alidade de tir courbe (dit tir « vertical ») à la grenade à fusil est disposée à l’avant de l’emplacement du levier d’armement (Photo 61). Composée d’une tige en plastique, elle permet une prise de visée pour un tir en cloche à la grenade à fusil par le biais d’un cran de mire et d’un guidon (Photo 62). Ce tir s’effectue en posant la crosse sur le sol. Le dispositif peut se basculer sur chaque côté de l’arme (disposition liée à la nature adaptable de l’arme en latéralité) et comporte deux positions de déploiement (à 45° et 74°), ici aussi, permettant de varier la distance d’engagement. Son action n’a aucune incidence sur le fonctionnement de l’arme comme fréquemment rencontré sur les dispositifs de visées sur d’autres armes. En réalité, c’est quasi systématique sur les armes fonctionnant par emprunt de gaz : le déploiement de ces aides est souvent lié à la fermeture de l’arrivée des gaz dans le système de réarmement. On notera que ce dispositif de visée n’est pas présent sur notre exemplaire d’étude du FAMAS G2
Cet organe de visée pour le « tir vertical » de la grenade à fusil est complété sur les FAMAS F1 et G2 de la Marine Nationale par un dispositif destiné à régler la valeur d’enfoncement de la grenade sur le manchon constitué par le cache-flamme et une bague réglable (Photos 63, 64 et 65). Hérité des MAS 36/51 et 49/56, cela permet de faire varier les distances lors des tirs courbes à la grenade à fusil. Le tir tendu, lui se fait toujours avec la grenade enfoncée au maximum sur le manchon. Notre exemplaire FAMAS G2, lui ne retient qu’un ressort de rétention de la grenade (présent sur la bague mobile des autres versions) pour une valeur d’enfoncement maximal, destinée au tir tendu. La chose est logique compte tenu de l’absence de dispositif de visée pour le tir « vertical ».
Accessoires
L’arme est originellement équipée d’une baïonnette et d’une bretelle. La baïonnette a la particularité de se monter au-dessus du canon…encore un point commun avec le G3 (Photos 66 et 67)! Elle est très directement héritée du MAS 49/56 et paraît même être interchangeable. Son indexation est réalisée par le biais d’une encoche sur l’avant du cache-flamme, ce qui implique que celui-ci doit être indexé au montage (Photos 68 et 69). Le cache-flamme n’est par conséquent pas démontable par le soldat. Il semble qu’aucune baïonnette n’ait été prévue sur notre exemplaire de FAMAS G2. Ceux de la Marine emploient la même baïonnette que le F1. Enfin, il semble que le G2 ait été proposé, en option, avec un montage pour baïonnette type M16. Le bouchon de tir à blanc (BTB) se monte sur le cache-flamme (Photos 70 et 71). La bretelle, dont les spécificités d’emploi sont plus particulièrement décrites dans l’article de Pierre, peut se monter indifféremment sur le flanc droit ou gauche de l’arme, et ce pour le F1 comme pour le G2 (Photo 72). Sur le F1 et le G2 de la Marine, elle se monte à l’avant de l’arme dans le prolongement de l’axe d’une branche de bipied (Photo 73). Sur les deux armes, la bretelle passe à l’arrière dans une boucle de métal surmoulé dans la crosse. La bretelle originelle possède un anneau métallique coulissant qui vient en prise sur une agrafe métallique située sur le point d’ancrage avant. Cette disposition permet, lorsque la bretelle n’est pas nécessaire, de la tendre sur l’arme pour éviter qu’elle ne traine. Une disposition particulièrement bienvenue à notre sens, pour le stockage, mais aussi au tir et toute manœuvre qui nécessite de conserver l’arme à la main plus qu’à l’épaule. Sur notre exemplaire de G2 dépourvu de bipied, la bretelle passe à l’avant plus simplement dans une des deux ouïes réalisées sur chaque côté de la PGM (Photo 74).
Le FAMAS F1 et G2 de la Marine reçoit donc un solide bipied. On notera d’ailleurs que ce dernier est démontable au niveau par l’utilisateur. Comme évoqué, notre exemplaire de G2, lui, en est dépourvu.
Enfin, le FAMAS emploie un chargeur dédié au cartouche de lancement pour le tir des grenades à fusil. Il est nommé chargeur Pour une Cartouche de Lancement ou PCL (Photo 75). D’une contenance d’une seule cartouche sur une seule colonne, ce chargeur à la particularité de ne pas pouvoir contenir de balle ordinaire car seules des munitions plus courtes (comme les cartouches de lancement), peuvent y être introduites (Photo 76). Cette dernière particularité lui vaut d’être normalement employé lors des défilés !
Munitions
La munition originellement destinée au FAMAS est un chargement de type M193 désignée « F1 ». Celle-ci possède un projectile de 3,5 g constitué d’un noyau plomb chemisé par un alliage cuivreux. La munition F1 est montée sur un étui laiton. En réalité, sa production et son utilisation réglementaire sont antérieures à l’adoption du FAMAS F1 (Photo 77). N’oublions pas que le premier fusil d’assaut employé réglementairement par l’armée Française, est – à notre connaissance – le Sig (Manurhin) 540 de calibre 5,56×45 et que le FN CAL dans le ce même calibre fut aussi longuement essayé par les troupes françaises. La munition qui sera pendant longtemps plus particulièrement dédiée au FAMAS F1 sera la « F1 A », avec A pour acier, qui indique la matière de l’étui. L’emploi de l’acier pour réaliser l’étui est non seulement judicieux d’un point de vue économique (évitant l’emploi du cuivre, métal plus coûteux à produire que le fer contenu dans l’acier), mais aussi particulièrement adapté au mode de fonctionnement de la culasse non-calée avec artifice de multiplication. En effet, les munitions à étui acier possèdent une plus grande adhérence aux parois de la chambre que celle en laiton, ce qui tend à ménager le fonctionnement de l’arme, qui tire son impulsion de réarmement du recul de l’étui dans la chambre. Cette munition est bien évidemment déclinée en version traçante (vernis rouge à la pointe du projectile). Ces munitions furent distribuées sous des conditionnements variés (Photo 78). Souvent, elles sont conditionnées sur lames-chargeurs de 10 cartouches, qui en adjonction d’une chargette, permet le garnissage rapide des chargeurs (Photo 79).
Enfin, le FAMAS-F1 s’est vu dédié d’autre type de munitions :
- Des munitions à blanc. Elles permettent, en adjonction du BTB, le tir à blanc en permettant le réarmement automatique de l’arme lors du tir d’une munition sans projectile.
- Des munitions dites « de lancement », dédiées au tir de grenade à fusil lorsque ces dernières n’emploient pas la technologie dite du « piège à balle » et qui permet de tirer des grenades avec des balles ordinaires.
- Des munitions de tir réduit dites « Balplast ». Ces munitions dont le projectile est en matière synthétique orange étaient destinées à l’entrainement des soldats dans les infrastructures n’autorisant pas les balles réelles de calibre comme le 5,56×45. Souvent, le type de stand de tir visé était des stands de tir pour arme de poing. Bien évidemment, ce type de munitions ne permet un tir précis qu’à de faibles distances (50 m maximum) et elles ne réarmement pas les mécanismes de l’arme. Attention, ces munitions restent d’une grande dangerosité et ne doivent en aucun être tirées sur autre chose que des cibles en papier…
Toutes ces munitions furent fabriquées en France, du temps où la France conservait encore ses propres moyens de production. Depuis, toutes ces munitions ont été substituées par des productions étrangères (MEN, IMI…), la Balplast, elle ayant carrément disparu. Ainsi, la munition F1 c’est vu être remplacée par la munition « F3 » : dans la nomenclature réglementaire Française (sauf erreur de notre part), il s’agit des munitions de type M193, mais de fabrication autre que par les arsenaux Français.
Les munitions plus particulièrement dédiées au G2 seront les F4 (fabrication française) et les F5 (fabrication étrangère), qui est de type SS-109, avec une balle de 4g dotée d’un noyau bi-matière plomb et acier. La chose est d’une grande logique au regard de la destination du G2 : s’inscrire dans la « standardisation » OTAN. La SS-109 est en effet la munition retenue par l’OTAN en octobre 1980. Précisions ici que nous ne connaissons pas de fabrication en série de ce type de munitions par les arsenaux Français (dites F4), toutes les productions rencontrées sur le sol national et étant employées de façon réglementaire étant étrangères (dites F5). Notons ici qu’il est tout à fait possible de tirer de la munition de type M193 dans un canon au pas de rayures de 229 mm (9 pouces) …et donc dans un G2 !
Enfin, précision ici que lorsque nous évoquons le fait que les munitions F1 et F3 sont de type M193 et que les munitions F4 et F5 sont de type SS-109, nous ne sous-entendons pas que ces munitions seraient parfaitement définies par une norme universelle…qui n’existe d’ailleurs absolument pas ! Il n’en est rien : ces munitions ont des spécificités établies par un cahier des charges rédigé par l’utilisateur (ici, en tout logique, la Direction Générale de l’Armement). Ne tombez pas dans l’écueil de croire que toutes les munitions de type M193 ou de type SS-109 sont identiques : il n’en est rien. En réalité, l’évocation de ces références se limite souvent à la définition du projectile, mais pas du chargement complet et de toutes ses subtilités. Nous renvoyons le lecteur intéressé par ces questions à la lecture du chapitre 4 de notre « Petit Guide de l’Armement », disponible sur ce même site.
Le démontage de campagne
Le démontage nécessaire à l’entretien de l’arme est d’une grande simplicité (Photo 80). Après avoir positionné l’arme sur le bipied et relâché l’anneau de la bretelle de son agrafe :
- On retire (à la main) la goupille de fixation la crosse.
- On retire la crosse.
- À l’aide de la goupille de fixation précédemment déposée, on pousse la goupille captive du boîtier mécanisme afin de retirer celui-ci. Cette opération peut également être réalisée avec la pointe d’une munition de 5,56. La goupille captive est, d’ailleurs, « pointée » dans ce but.
- Après avoir positionné le levier d’armement en appui sur arrière de son cran de rétention, on s’aide une fois encore d’une des goupilles de fixations pour pousser la goupille captive de l’ensemble mobile. Ici aussi, l’opération peut être réalisée avec la pointe d’une munition de 5,56.
- On retire ensuite l’ensemble mobile vers l’arrière.
- Si nécessaire, on peut retirer la PGM après retrait (à la main) de sa goupille de fixation. Si la chose peut être utile pour nettoyer l’arme de sa contamination environnementale, elle présente l’inconvénient de ne plus permettre de faire reposer son arme sur le bipied. L’arme positionnée sur le bipied est très pratique à nettoyer, car elle ne « traine » pas sur le sol (Photo 81).
On notera que la PGM et la crosse sont potentiellement liées par la bretelle, mais cela ne gêne pas réellement pour les opérations de nettoyage : au pire, le démontage de la bretelle sur la PGM est d’une grande simplicité : il suffit de pencher la branche du bipied vers 45° à l’avant et de faire tourner l’attache de la bretelle jusqu’à la position désirée. Dans le même esprit, les branches du bipied se désolidarisent aisément : après traction de la branche, il suffit de la positionner vers l’avant de l’arme.
Comme évoqué précédemment, l’ensemble mobile peut être quasi intégralement (à l’exception de la goupille captive de la masse additionnelle) démonté par le soldat, et ce sans outillage :
- On enfonce la culasse dans la masse additionnelle, puis on la décale vers le bas (sens de l’arme) pour la désolidariser. On retire ainsi la culasse, le LAI et le percuteur.
- Le LAI sort aisément de la culasse par rotation…il s’agit simplement (pour une personne peu familière avec l’arme) de se souvenir du bon sens du LAI pour le remontage. Cependant, pas d’inquiétude : si un remontage incorrect du LAI dans la culasse est « possible », l’ensemble mobile ainsi obtenu ne peut être inséré dans l’arme.
- Le percuteur sort naturellement lors du retrait du LAI. On notera que celui-ci est en acier inoxydable : un plus pour la fiabilité et l’entretien !
Ce démontage est déjà largement suffisant pour l’entretien de l’arme (nettoyage, inspection, lubrification). L’utilisateur plus précautionneux (ou désirant modifier la latéralité de son arme) peut déposer le reste des pièces constitutives de la culasse comme évoqué précédemment lors de notre explication sur le changement de latéralité de l’éjection. Ici, la difficulté est de ne perdre aucune pièce sur le terrain…
On notera que le démontage du chargeur, d’une grande simplicité (il suffit de presser la planchette de verrouillage dans la semelle, et de faire coulisser cette dernière vers l’arrière), n’était pas prévu réglementairement par le soldat. Il est cependant largement réalisable par l’utilisateur et sa réalisation constitue de notre point de vue, un aspect important du maintien opérationnel (nettoyage, inspection, lubrification) d’une arme. Cependant, une fois encore, nous encourageons, chaque utilisateur d’un matériel réglementaire à respecter scrupuleusement les instructions institutionnelles…aussi débiles soient-elles ! Elles ont souvent une raison insoupçonnée…et de toute façon, en cas de problème, vous aurez tort !
L’arme ainsi démontée propose une bonne accessibilité pour le nettoyage, notamment des zones sensibles (tête de culasse et ses environs dans le boîtier). Je pense même, qu’il s’agit d’une des armes les plus simples à nettoyer de par l’absence de zone difficile d’accès sujette à un fort encrassement lié au tir. La zone la plus complexe à nettoyer demeure le logement du LAI dans la carcasse : rien d’insurmontable. Les militaires ayant connu le FAMAS (une très large majorité au moment où nous écrivons ces lignes) pourront apprécier la différence avec le HK 416 F, qui possède des recoins difficiles à atteindre, mais qui fort heureusement, ne se contaminent pas par le tir comme sur un AR-15 doté d’un tube adducteur.
En conclusion
Mon début de carrière en 2005 en tant que technicien au sein du Ministère de l’Intérieur m’a tenu un temps éloigné de cette arme…à la place, nous avions (en CRS, mais aussi dans d’autre unités) l’AMD 5.56, une version militarisée de la Ruger Mini-14 dérivée de l’« ACC 556 »…mais sans le cache-flamme ni le tenon de baïonnette. J’y ai aussi côtoyé, les SIG 543, 551 et 552 et surtout, l’excellent G36. Cependant, la mutualisation Police / Gendarmerie mais aussi la forte proximité avec de nombreuses unités et personnels de l’armée a fini par m’apporter une certaine familiarité avec l’arme. J’ai ainsi pu prendre conscience de la popularité de l’arme au sein des forces, mais aussi de sa viabilité après environ 40 ans de service ! Les pannes ne semblent pas avoir trop été fréquentes. En tout cas, ce n’est pas sans une certaine nostalgie que je regarderai disparaitre des rangs, le fusil qui m’a probablement le plus fait rêver dans mon enfance, même si par raison, bien d’autres lui ont succédé par la suite.
Arnaud LAMOTHE
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