Fusils d’assaut : comportement au tir
La comparaison entre des armes est toujours un procédé complexe. En fonction de la façon dont il est réalisé et conclu, ce procédé peut être inexact, malhonnête…mais aussi instructif ! Ici, nous allons nous livrer à la comparaison du comportement au tir d’un panel de fusils d’assaut dont l’intérêt n’est pas de décerner un « vainqueur », mais bien de tirer des enseignements que chacun exploitera à bon escient pour forger son propre jugement.
Le choix du panel
Concernant le domaine du fusil d’assaut, la comparaison « AK / AR » paraîtrait tomber sous le sens pour des raisons historiques. Cependant, ne nous laissons pas aller à cette émotion primaire des antagonismes Est / Ouest. Il nous paraît ici plus intéressant d’étudier de prime abord l’évolution du comportement des armes de la famille « simplifiée » des FAFusil d'Assaut More Kalashnikov, c’est-à-dire : AK-47, AKM et AK-74. Cela sera la base de cette première partie. À ce panel, il nous a paru pertinent (et amusant, ne boudons pas notre plaisir !) d’ajouter deux armes représentatives des productions de cette période 1949-1974 : le M16A1 américain, et le Vz.58P tchécoslovaque. De même, l’ajout d’une Kalashnikov en calibre 5,56×45 nous a paru intéressant : nous avons donc employé un Zastava M21A. Enfin, pour le plaisir (et la légende !), nous avons également déployé un AKS-74u. De plus, ce dernier ajout n’est pas dénué d’enseignement, bien au contraire. (Photo 01)
Ce panel nécessite quelques observations préalables :
- À l’exception de l’AKS-74u, toutes ces armes sont des fusils d’assaut possédant des longueurs de canon « standard » pour leurs calibres : environs 40 cm pour les 7,62×39 et 5,45×39, environs de 45 à 50 cm pour les 5,56×45.
- La comparaison d’armes employant des munitions intermédiaires de générations différentes ne doit pas se faire (une fois encore) dans un esprit de « compétition ». En effet, comparer le 7,62×39 au 5,56×45 n’a que peu de sens technique, mais peut avoir des applications pratiques.
- Si la date de conception des armes s’étale sur plus d’un demi-siècle en prenant en compte le M21A, elle peut se résumer en réalité d’un point de vue technique à la période 1949 (ou 1954 la date de mise en production des AK-47 étant 1949 pour le type 1 et 1954 pour le type 3, la version la plus fréquemment rencontrée) à 1980 (date d’adoption et de normalisation de SS-109 employée dans le M21A). Le M21A reste un fusil d’assaut construit autour du boîtier du RPK, donc, une technologie très proche de l’AKM.
Nous étendrons à d’autres armes occidentales dans la seconde partie, en lien ici.
Les forces en présence
Petite présentation du matériel par ordre chronologique :
L’AK-47 type 3 (mise en service en 1954) : l’exemplaire de cet essai est un AK-47 dont le boîtier est construit à Izhevsk et qui est assemblé en Bulgarie (Arsenal). L’arme est dans son jus. Pour illustrer la partie article de ce travail, la photo est celle d’un AK-55 Hongrois…n’ayant pas pu prendre l’exemplaire Bulgare en photo dans des conditions « studio » (Photos 02 et 03). Les spécificités des deux armes sont très proches, à la différence notable de la matière des garnitures, ayant sans doute une influence sur le poids que nous n’avons pas pu mesurer pour le moment.
Le Vz.58P (mise en service en 1958) : Rien à signaler, l’exemplaire de cet essai est une production tchécoslovaque, pur jus et quasiment neuf… (Photos 04 et 05)
L’AKM (mise en service en 1959) : l’exemplaire de cet essai est un Radom PMKM (Pologne), soit une variante très proche (pour ne pas dire, quasi-identique) à l’AKM Soviétique (Photos 06 et 07). Elle est équipée du compensateur de relèvement biseauté adopté vers 1965 (nous ferons un essai détail sur ce dispositif dans un travail à venir). L’arme est dans son jus.
Le M16A1 (mise en service officielle dans l’US Army en 1967) : l’exemplaire de cet essai est un Colt qui proviendrait (selon une source internet) d’un lot d’armes vendues aux Philippines. Pur jus… (Photos 08 et 09). On peut noter ici à propos de la date que nous employons que des variantes du fusil AR-15 ont connu des utilisations sur le terrain dès le début des années 60. Mais nous nous intéressons ici en particulier au modèle à notre disposition. Ainsi, nous avons choisi de retenir son année d’adoption officielle dans l’US Army.
L’AK-74 (mise en service en 1974) : l’exemplaire de cet essai est un Arsenal (Bulgarie), dénommé AR-M1 dans le livre de F. lnammico et AKK-74 (Avtomaticheskiy Karabin Kalashnikova) dans le livre de John Walter (Photos 10 et 11). Ici aussi, une arme quasi identique à l’AK-74 soviétique. On peut noter que la crosse et le garde-main inférieur emploient des bois bruts alors que les productions soviétiques emploient du lamellé-collé. Le dispositif de bouche est de type 2. L’arme est dans son jus.
L’AKS-74u (mise en service en 1979) : l’exemplaire de cet essai est Soviétique, produit à Tula. Elle semble être repassée en arsenal mais présente des finitions identiques aux armes neuves. (Photos 12 et 13)
Le M21A (mise en service en 2004) : l’exemplaire de cet essai est une variante de Kalashnikov conçue et produite par Zastava en Serbie (Photos 14 et 15). Il s’agit de l’arme la plus récente. Moins connue que les autres protagonistes de ce banc, il s’agit d’une modernisation de l’AKM construite autour du boîtier du RPK. Les Yougoslaves avaient originellement employé ce boîtier (qui permet l’installation d’un canon de plus fort diamètre tout en utilisant une tôle plus épaisse que l’AKM) sur une grande partie de leurs productions de Kalashnikov pour autoriser un emploi plus durable du tir de la grenade à fusil. Elle reprend des éléments du Galil (report du sélecteur sur le côté droit et crosse hérité du FAL Para, mais modernisé) et de l’AKS-74u (couvre-culasse articulé avec verrouillage du tube emprunt de gaz). L’arme fût adoptée dans l’armée Serbe en 2004. Ici avec le M21A, nous avons un canon de 460 mm, plus à même d’exploiter le potentiel de la 5,56×45. Et non, il n’y a rien de l’AK-74 sur cette arme contrairement à ce qu’on peut lire sur le Wikipédia Français…
Autant dire, du beau monde !
On notera ici que dans la mesure du possible, nous avons opté pour des variantes à crosse « fixe et pleine », pour une ergonomie comparable. Évidemment, cela n’est pas possible pour l’AKS-74u et la M21A qui sont toutes deux dotées nativement de crosses pliantes plus « légères ». Cependant, dans les deux cas, la prise en main est finalement proche de celle offerte par les autres crosses du panel, ce qui n’aurait pas été le cas avec les crosses pliantes des AKS-47 et AKMS.
Pour les munitions, nous avons uniquement employé des productions destinées à l’usage militaire (Photo 16):
- Pour la 7,62×39, des munitions chinoises de surplus (type M43, étui acier cuivré). Précisons ici que de nombreux essais ont été réalisés avec des munitions de surplus militaire d’origine chinoise, et que contrairement à des légendes urbaines persistantes, celles-ci nous ont toujours donnée entièrement satisfaction !
- Pour la 5,56×45 type M193, des munitions de marque MEN.
- Pour la 5,45×39, des munitions soviétiques de surplus (type 7N6 de production tardive, étui acier laqué).
- Pour la 5,56×45 type SS-109, des munitions de marque MEN.
Dans ce genre d’exercice, le choix des munitions n’est pas à prendre à la légère : toutes les munitions ne se valent pas…loin s’en faut. On ne le répétera jamais assez…
Commençons par le commencement
De façon synthétique, l’évolution des armes Kalashnikov en URSS s’est réalisée en prenant en compte des aspects productiques, ergonomiques et enfin balistiques avec l’adoption de la 5,45×39. Ici, nous nous focaliserons donc sur un des aspects ergonomiques : le comportement de l’arme au tir. Les autres aspects seront abordés dans des travaux en cours de réalisation. Pour faire évoluer le comportement de l’arme au tir, les Soviétiques ont principalement travaillé trois points :
- La pente de la crosse : celle-ci se redresse avec le passage à l’AKM. Le but est de ramener le canon dans l’axe du point d’appui sur le corps, et ce au détriment d’une prise de visée légèrement moins instinctive. Effectivement, la pente de crosse de l’AK-47 place les organes de visées dans l’axe du regard : sur l’AKM, il est nécessaire de légèrement baisser la tête. On s’y accoutume instinctivement… (Photos 17 et 18). Par ailleurs, pour l’exercice du tir en rafale à courte distance (globalement à partir de 25 m), l’œil n’est normalement pas dans le « viseur » … mais sur la cible.
- Le dispositif de bouche : vers 1965, est adopté le compensateur de relèvement en biais destiné à compenser le relèvement du tireur droitier, qui par la position de l’arme sur son corps, tend à relever le tir tout en partant vers la droite. Par travail des gaz sur une surface métallique, le compensateur génère une impulsion au bout du canon vers le bas et à gauche. Le but est de conserver le canon dans l’axe. Avec l’AK-74, le dispositif est plus complexe, car il réalise la même fonction, mais également celle de cache-flamme (combustion des imbrûlés dans une chambre) et de frein de bouche : le gaz travaille une nouvelle fois sur une surface métallique, cette fois-ci pour combattre l’enfoncement de l’arme dans l’épaule du tireur (Photo 19). L’aspect « cache-flamme » sera abordé prochainement dans un autre travail. Ceux qui s’intéressent au sujet peuvent se reporter au chapitre 5 du livre « Petit Guide de l’Armement » disponible sur ce site.
- Bien sûr, avec l’adoption d’un calibre intermédiaire de seconde génération avec l’AK-74 : le 5,45×39. Entre autres choses, ce calibre a une impulsion de recul inférieure à la 7,62×39 car ayant, bien sûr, une énergie plus faible.
Outre ces trois points, on peut noter ici deux autres points qui participent à l’évolution du comportement de l’arme :
- Modification du poids : le passage de l’AK-47 de type 3 vers l’AKM génère un allégement mesuré par nos soins de 187 g pour l’arme seule sans chargeur et jusqu’à 361 g en prenant en compte l’évolution totale des chargeurs (comprendre ici, du chargeur lisse précoce au chargeur synthétique AG-4 adopté dans les années 1960)…ce qui est considérable sur une arme de moins de 4 kilos ! Un bénéfice au quotidien pour le soldat mais qui, à énergie à la bouche équivalente, se traduit par une augmentation du recul ressenti.
- L’ergonomie du garde-main inférieur permet une meilleure préhension de l’arme à l’avant : lisse sur l’AK-47, il comporte un bossage sur l’AKM et enfin un bossage et une rainure sur l’AK-74. Une évolution bien venue…surtout lorsque tout est humide… (Photo 20). Bien sûr,ce changement n’apporte pas de modification directe du comportement de l’arme, mais l’amélioration de la prise en main facilite l’exercice. Il s’agit donc d’une amélioration que nous qualifierons de « indirecte ».
Enfin, il est nécessaire ici d’introduire le fait que le passage de l’AK-47 à l’AKM voit l’apparition du ralentisseur de chien en rafale. Bien que ce dispositif agisse sur la cadence de tir (souvent annoncé à environ 25 coups par minute (cpm) de moins), il n’est pas à assimiler à un « ralentisseur de cadence ». Pourquoi ? Parce que cet effet n’est pas mesurable en tant que tel par l’utilisateur, contrairement à un ralentisseur de cadence qui abaisserait la cadence de 200 cpm. Le but de ce dispositif, qui freine le chien uniquement sur les coups tirés en rafale, est de « laisser les pièces reprendre totalement leur place avant le départ du coup suivant en rafale ». Ce dispositif est détaillé dans les légendes des photos 21 et 22.
Pour visualiser cette évolution, nous avons réalisé 3 premières vidéos comparatives :
- AK-47 / AKM : évolution chronologique.
- AKM / AK-74 : évolution chronologique.
- AK-47 / AK-74 : bilan familial.
Notre protocole
Chaque séquence est réalisée par le tir d’une seule rafale de 30 coups…sauf quand votre humble serviteur se « vautre » sur le garnissage du chargeur. C’est le cas pour le Vz.58P, mais nous détaillerons la chose en temps voulu.
Les tirs ont été réalisés en position debout. Ce choix nous paraît cohérent au vu de l’emploi d’un fusil d’assaut :
- En position allongée, le tireur à poste doit normalement délivrer des tirs précis, ayant le « temps » de soigner son tir et le souci d’économiser ses munitions. Le coup par coup est donc plus particulièrement désigné pour cette position de tir. Ceci ne signifie nullement que les tirs en rafale – depuis un bipied ou non – ne soient jamais délivrés depuis une position couchée.
- En position debout, le tireur en déplacement compense le manque de temps nécessaire à l’acquisition d’une cible fugace par la saturation de la rafale en consentant le sacrifice d’une consommation excessive. Le tir en rafale nous paraît donc plus particulièrement dévolu à cette position. Ici aussi, cela ne signifie pas que le tir en coup par coup n’est pas délivré au en position debout !
Si de façon évidente, le corps n’amortit pas de la même manière le comportement de l’arme dans chaque position, on retrouve des constantes dans le comportement de l’arme.
Insistons ici sur le fait que le gain du comportement de l’arme est aussi bien perceptible en semi-automatique qu’en rafale :
- En semi-automatique, par un dépointage moindre, il permet une reprise de la visée plus rapide et donc une grande répétitivité des tirs. Il s’agit d’un gain souvent omis dans de nombreux ouvrages sur le sujet…pour une raison qui nous paraît bien étrange !
- En rafale, elle limite la dispersion des tirs et permet donc une meilleure gestion de la « gerbe de plombs » pour faire une comparaison avec l’utilisation d’un fusil de chasse…qui n’est pas anodine. Le but de rafale est le même que celui de tirer de la chevrotine ou de la grenaille : multiplier les projectiles dans une surface donnée afin de maximiser les probabilités d’atteintes sur une seule et même action de tir. Bien sûr, il existe des exceptions, comme l’AN-94 où le but est de placer (vraisemblablement, jusqu’à 100 m selon nos informations) deux projectiles dans le même trou pour défaire les protections balistiques. Mais les exceptions ne font pas une règle…
Pour les besoins de la démonstration, le comportement de l’arme est plus simple à mettre en évidence avec le tir d’une rafale longue…tout en étant plus spectaculaire !
Ma façon de regarder ce type de vidéo
Établissons de façon liminaire ici que nous nous intéressons au comportement des armes, et notamment de leurs canons, qui nous indiquent la direction des tirs. Les mouvements provoqués par le tir induisent généralement des variations angulaires du canon d’un tir à l’autre, et donc une différence de point d’impact. Cependant, certaines armes tendent à positionner le canon sans amplification angulaire notable…et d’autres en l’exagérant. Ceci se traduit de façon paradoxale à l’image :
- Certains mouvements « amples » conduiront à des écarts faibles en cible, et ce malgré la distance, dans la mesure où le canon reste sur un plan relativement parallèle au tir précédent : les tirs suivent des trajectoires relativement parallèles.
- À l’inverse, des écarts « faibles » à la bouche, mais générant une variation angulaire importante du canon conduiront à une dispersion importante des tirs, amplifiés avec la distance : les tirs suivent des trajectoires obliques.
Pour le tireur, dans ce type d’exercice, le but est normalement de « grouper les tirs ». Mais cela se traduit bien souvent par « baisser la rafale », ou du moins éviter qu’elle ne monte trop. Il est donc normal de constater que l’effort du tireur est de rabaisser le tir. Il ne dispose par ailleurs que de peu de temps pour agir : les mouvements sont donc « brusques ».
Plusieurs phases et points particuliers de chaque vidéo sont à mon sens intéressants à regarder :
- Les premiers coups tirés : fixez la bouche du canon. Ces premiers coups se produisent avant que le corps (cerveau compris) n’ait le temps de réagir. Ainsi, le corps « subit » et on voit sur ces premiers coups le vrai comportement imprimé par l’arme.
- Le « milieu » de la rafale : on balaye du regard l’ensemble de l’arme pour observer son comportement global. Le corps ayant pris en compte le mouvement constant de l’arme, on voit, comment il est possible de gérer les mouvements de l’arme…tant que l’arme est maitrisable ! Mais c’est ici le cas de l’ensemble du panel : nous verrons dans la seconde partie de ce travail (en lien ici) ce qu’il en va pour les armes individuelles en 7,62×51…usurpant parfois le titre de « fusil d’assaut ». Le terme de « fusil de combat » (« Battle Rifle » chez nos camarades d’outre-Atlantique) permet une distinction entre les deux familles qui nous paraît bienvenue.
- La fin de la rafale : dès le dernier coup tiré, on revient sur la bouche de l’arme. De façon analogue au début de la séquence, l’arrêt du tir libère le corps des contraintes produites par la rafale à une vitesse supérieure à ce que le corps (cerveau compris) peut prendre en compte : le corps subit. Dès lors, le corps produit un mouvement qui correspond à l’effort musculaire produit pendant la phase de tir pour maitriser l’arme : mouvement vers l’avant (prise en compte du recul) parfois accompagné (suivant les cas), d’un mouvement vers le bas (prise en compte du relèvement).
- Le panache de fumée : il permet de comprendre la direction que prennent les gaz en sortie du canon et de matérialiser le cas échéant, le travail du dispositif de bouche. Ce dernier point explique la raison de notre cadrage : il doit laisser du champ pour visualiser le panache de fumée à l’avant de l’arme.
Bien évidemment, tout est intéressant à regarder sur ce type de vidéo (ok, sauf la tronche du tireur)… mais ces quelques points permettent réellement de comprendre le comportement de l’arme… et la capacité du tireur à la gérer.
À titre indicatif, les vidéos sont filmées en 240 images par seconde, pour un rendu final avec un ralenti de 1/8 de la vitesse normale.
Pour chaque séquence, nous donnerons à titre comparatif les cadences de tir. Celles-ci sont déterminées par la mesure du temps séparant le premier départ de coup (premier panache au bout du canon) au dernier coup (dernier panache en bout de canon). À partir de là, un tableur informatique va faire le travail pour nous fournir les chiffres les plus exacts possible. Le tableau est consultable à la fin de la galerie d’images.
Chaque vidéo comporte la succession des séquences suivantes :
- La séquence comparative au ralenti avec l’arme la plus ancienne en haut.
- Le tir en vitesse réelle de chaque arme seule par ordre chronologique.
- Le tir au ralenti pour chaque arme seule par ordre chronologique.
Nous décrirons au gré des comparaisons les phénomènes observés et ce de façon opportune. Le but étant d’exposer le plus clairement un nombre maximum d’informations aux lecteurs, leur permettant de se faire leurs propres idées.
Dernier point, rappelez-vous que Youtube permet de ralentir la vitesse de lecture de la vidéo : cette disposition est particulièrement intéressante ici.
1. AK-47 & AKM
Cadences de tir mesurées sur la séquence :
- AK-47 type 3 : 30 coups en 2,63 secondes, soit 683 cpm.
- AKM : 30 coups en 2,73 secondes, soit 658 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : de manière générale, si le tir de l’AK-47 tend à remonter, celui de l’AKM tend à…descendre ! Cette différence est très visible :
- Sur les premiers tirs : l’AK-47 remonte, l’AKM reste en ligne, voire descend !
- À la fin du tir : l’AK-47 plonge en avant et vers le bas, l’AKM part principalement vers l’avant.
Le panache de fumée montre bien le travail du dispositif de bouche : sur l’AK-47, il part droit devant, sur l’AKM, il monte vers l’avant…et en fait sur la droite, mais ce n’est pas visible sur la vidéo.
De même, le canon de l’AKM connaît une flexion remarquable au départ du coup : l’action des gaz sur le dispositif de bouche « tord le canon ».
L’AKM se montre plus « remuante » que l’AK-47 : la différence de poids paraît être une explication satisfaisante.
On note que les deux armes impriment un « roulis ». Ce roulis est en toute vraisemblance imputable à trois facteurs (par ordre chronologique) :
- La mise en rotation du projectile par les rayures dans le canon.
- Le déverrouillage rotatif de la tête de culasse (ajout réalisé suite à la généreuse contribution documentée de M. Kempeneers Gabriel que nous tenons à remercier ici).
- La présentation alternée de la munition dans le chargeur. Ainsi, quand on regarde le premier tir, il est net que le chargeur imprime un mouvement sur le côté lors du recul de l’ensemble mobile, puis lors de la prise en compte de la munition lors du retour de ce dernier. Ainsi, la prise en compte de la munition étant alternée sur les lèvres, le chargeur imprime un mouvement de balancier renforcé par chaque cycle. Ce dernier point, issu de constatations également faites sur d’autres armes du système Kalashnikov au cours d’autres travaux (notamment sur Valmet M76), reste à approfondir.
La proportion de chacun des facteurs nous paraît difficilement estimable avec les données à notre disposition. Cependant, la mise en rotation du projectile semble avoir un rôle prépondérant : l’arme semble imprimer un « à-coup » de rotation horaire (un à-coup à droite pour l’extrémité inférieure du chargeur, soit une rotation dans le sens des rayures, à droite) à chaque tir et on constate que ce roulis est moins marqué sur l’arme au canon le plus court : celui de l’AKS-74u (détaillé plus bas) … ou celui où le pas de rayures est plus lent (M16A1 : 1 :305 mm, soit 1 :12 pouces). De plus, les documents mis à disposition par M. Kempeneers (qui analysent par des moyens scientifiques le mouvement du recul du FN SCAR-L) tendent également à démontrer que l’action de déverrouillage a une implication importante dans ce phénomène.
Enfin, la cadence de tir de l’AKM est légèrement plus faible : la cause pourrait être le ralentisseur de chien évoqué précédemment. Cependant, gardons-nous bien d’être ici catégorique sur la cause de cette différence de cadence de tir…l’état général de l’arme (usure de l’évent d’emprunt de gaz, état des ressorts…) pourrait aussi expliquer cette différence dont les effets restent minime pour le tireur.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : cassons immédiatement un mythe parfois rencontré : les deux armes sont parfaitement maitrisables en rafale. Cependant, l’effort à fournir sur l’AKM est moins important que pour l’AK-47. Lors d’un exercice « posé » comme ici (pas de stress, bien au contraire…) l’AK-47 reste très maitrisable. Cependant, avec une position moins adéquate, la rafale est rapidement hors cible (en fonction de la distance, bien entendu …). Avec l’AKM, la chose est bien plus aisée : on tend même à descendre lorsqu’on est mal positionné.
Sur cette comparaison : cette première comparaison est très intéressante, car elle matérialise bien les évolutions d’une arme. On comprend ici pourquoi les Soviétiques ont fait le choix de remplacer leur parc d’armes seulement 5 ans après la mise en production de l’AK-47 type 3 :
- Le gain productique est considérable (passage à la tôle emboutie, optimisation de la production par un redessin de la plupart des pièces)
- Le soldat est doublement gagnant : l’arme est allégée tout en ayant un meilleur comportement au tir.
En contrepoint, l’utilisateur de l’AK-47 pourrait préférer son démontage approfondi (en réalité, celui du système de mise à feu et de l’ensemble récupérateur) légèrement plus simple que celui de l’AKM…mais je pinaille !
2. AKM & AK-74
Cadences de tir mesurées sur la séquence :
- AKM : 30 coups en 2,73 secondes, soit 658 cpm.
- AK-74 : 30 coups en 2,62 secondes, soit 688 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : l’AK-74 recule moins profondément dans l’épaule que l’AKM. La munition intermédiaire de seconde génération et le frein de bouche font ici leur office. Le relèvement est finalement assez comparable, même si l’AK-74 s’abaisse moins brutalement. La cadence de tir de l’AK-74 est ici légèrement supérieure : le changement de calibre peut l’expliquer (plus de pression à l’évent ?) … cependant ici aussi, gardons-nous bien d’être catégorique sur la cause de cette légère différence. Quoi qu’il en soit, les cadences de tir sont voisines. En fin de séquence, la « messe est dite » : l’AK-74 ne bouge que très peu, surtout en comparaison de l’AKM.
Le panache de fumée est notablement plus « lent » sur l’AK-74 : il a travaillé dans le dispositif et commence à se diffuser de façon visible autour de ce dernier, et non loin devant comme dans les deux cas vus précédemment.
Comme sur l’AKM, le canon de l’AK-74 subit une flexion lors du tir dû à l’action des gaz sur le dispositif de bouche.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme sur la vidéo précédente, une des deux armes est bien plus aisée à maitriser que l’autre. Ici, et sans suspense, il s’agit de l’AK-74. Cette arme pardonne aisément une mauvaise position.
Sur cette comparaison : la légitimité est déjà plus discutable que la première de par la différence de calibre. Elle conserve cependant une légitimité historique face à l’évolution de l’arme. Bien entendu, le gain du comportement de l’arme ne justifie pas à lui seul le remplacement du parc. Ici, le leitmotiv, c’est le passage au calibre intermédiaire de seconde génération :
- Augmentation de la distance d’engagement par une vitesse initiale plus élevée (900 m/s pour la 5,45×39 contre 715 m/s pour la 7,62×39). Ceci se traduit en l’espèce par un gain de 140 m sur la hausse de combat qui passe ainsi de 300 m sur AK-47 / AKM à 440 m sur AK-74.
- Augmentation de la capacité d’emport en munitions. Ce gain est palpable de façon globale sur la chaîne logistique.
- Effet vulnérant amélioré par un comportement terminal plus étudié (le projectile de la 5,45×39 bascule plus rapidement).
Ici aussi, la chose se fait nécessairement au détriment d’autre chose : mais la comparaison entre les calibres intermédiaires de première et seconde génération nécessite un travail à part entière.
En marge de cet essai, on peut souligner que le démontage du système de mise à feu a reçu une modification destinée à faciliter cette opération par le soldat…une sorte de correction du « défaut » introduit sur l’AKM précédemment évoqué! La chose sera détaillée dans un travail à venir.
3. AK-47 & AK-74
Cadences de tir mesurées sur la séquence:
- AK-47 type 3 : 30 coups en 2,63 secondes, soit 683 cpm.
- AK-74 : 30 coups en 2,62 secondes, soit 688 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : finalement et logiquement une synthèse des cas précédents. L’AK-74 oppose une stabilité plus grande que l’AK-47, très visible sur les premiers coups et en fin de séquence. Il ne saurait pas en être autrement ! Fait amusant, dans ce cas présent la cadence de tir est quasi identique ! On remarque que dans le « cœur » de la rafale, les deux armes restent en ligne : elles sont maîtrisables. Mais le problème reste le même : dans quelles conditions d’utilisation ?
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : réponse à la question précédente…évidemment, l’AK-74 est bien plus permissive que l’AK-47…L’AK-74 ne nécessite finalement que peu d’actions « correctives ». En exagérant le trait, on pourrait dire qu’il est possible de la « laisser vivre ».
Sur cette comparaison : ici, nous nous livrons à une première comparaison qui n’est pas équitable sur un plan technique ou historique. Cependant, elle est pleine de bon sens au regard de l’évolution familiale. Oui, le soldat bénéficie d’un outil globalement plus performant pour sa mission « le combat d’infanterie ».
Élargissons notre champ de vision
Passé cette étape sur l’évolution de comportement au sein d’une même famille, laissons-nous aller à quelques comparaisons plus discutables, mais pas moins instructive ! Nous allons suivre ici une trame « chronologique » afin de ne pas totalement départir de raison cet exercice…
4. AK-47 & Vz.58P
Bon, comme évoqué précédemment, je suis à l’amende ! Suite à une erreur de ma part, le chargeur du Vz.58P ne contenait que 25 cartouches sur la séquence originellement destinée à la comparaison. Par chance, ce même jour j’avais une autre prise de…29 cartouches. Décidément… De plus, celle-ci avait été réalisée avec la coque de protection de la caméra…sauf que celle-ci altère sensiblement la qualité du son…j’apprivoise le matériel…Plus sérieusement, un début d’explication réside dans le fait que le chargeur de Vz.58 ne possède pas d’indicateur de chargement. Ainsi, lorsqu’on approvisionne le chargeur depuis un conditionnement en « vrac » sans compter les cartouches, on se retrouve induit en erreur par la dureté apparente de l’approvisionnement d’un chargeur déjà bien rempli. Surtout que ce chargeur est bien plus rude à remplir que celui d’un AK… La chose est notée pour la prochaine fois.
Afin de me faire pardonner ces erreurs grotesques, je vous propose…plus de vidéos ! Il y aura les deux séquences pour les vidéos avec le Vz.58P : celle de 29 coups servira pour la comparaison de comportement, celle de 25 coups sera ajouté en « bonus », pour avoir un son correct pour la comparaison « auditive ».
Notons que ces erreurs de réalisation ne portent pas à conséquence sur les conclusions de ce travail…
Cadence de tir mesurée sur la séquence :
- AK-47 type 3 : 30 coups en 2,63 secondes, soit 683 cpm.
- Vz.58P : 29 coups en 2,08 secondes, soit 839 cpm et 25 coups en 1,77 secondes, soit 847 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : retrouvant une pente de crosse similaire avec un calibre identique, les 3 premiers coups tirés produisent un comportement quasi identique. Par la suite, le Vz.58P se montre plus remuant que l’AK-47. Ceci est cohérent vis-à-vis de la différence de poids et de la cadence de tir :
- Un poids mesuré à 3,945 kg pour l’AK-47 type 3 pour une cadence de tir mesurée à 683 cpm (mesure du poids prise sur un exemplaire Polonais différent du modèle tiré : la mise à jour sera réalisé dès que possible).
- Un poids mesuré à 3,148 kg (presque π ! « Hasard ou réalité scientifique ? ») pour le Vz.58P pour une cadence de tir mesurée à 839 cpm pour la séquence comparative.
Le Vz.58P est ainsi plus de 20% plus léger que l’AK-47 type 3 et 23% plus rapide ! Des différences qui comptent…
En marge du comportement, on note que le Vz.58P produit régulièrement une flamme visible en plein jour : nous reviendrons sur cet aspect dans un travail à venir…désolé, mais on ne peut pas tout traiter de façon simultanée ! Cependant, on peut d’ores et déjà mettre en cause un canon légèrement plus court, et surtout, la différence de cadence de tir.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : le Vz.58P est un excellent fusil : léger, précis, fiable, et d’une accessibilité pour le nettoyage exceptionnelle. Ceux qui me lisent savent à quel point j’affectionne ce dernier point et pour cause : je passe sans doute plus de temps à nettoyer qu’à tirer, chose qui ne me dérange pas ! Mais soyons clair, parmi le panel, il s’agit de l’arme la plus âpre à maitriser pour cet exercice. Comme déjà mentionné, on peut discerner de prime abord trois causes : un poids plume, une cadence de tir importante et une pente de crosse peu favorable à l’exercice. À ces trois causes, on peut ajouter un point commun à toutes les armes vues jusqu’à présent : la mise en butée de l’ensemble mobile. La mise en butée est effectivement brutale sur les 4 armes vues jusqu’à présent : la course est courte (volonté de garder l’arme « compacte ») et il n’y a pas d’amortisseur (volonté sans doute économique). Mais du coup, à chaque cycle, l’ensemble mobile « tape » le boîtier (la chose est visible). Ce choc se ressent dans le comportement de l’arme.
Sur cette comparaison : elle fait particulièrement sens. En effet, les deux armes emploient la même cartouche et sont de la même période. Le fait que les deux armes emploient une mécanique radicalement différente constitue ici un plus : cela permet de mieux comprendre l’influence de certain facteur.
5. Vz. 58P & AKM
Cadence de tir mesurée sur la séquence :
- Vz.58P : 29 coups en 2,08 secondes, soit 839 cpm et 25 coups en 1,77 secondes, soit 847 cpm.
- AKM : 30 coups en 2,73 secondes, soit 658 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : les constatations faites sur cette comparaison AK-47 / AKM se retrouve globalement ici, et de façon exacerbée.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : « bis répétita » des constatations faites sur la comparaison AK-47 / AKM, mais ici aussi, de façon exacerbée…le VZ.58P ne pardonne pas…l’AKM beaucoup plus.
Sur cette comparaison : les deux armes sont extrêmement contemporaines et emploient la même cartouche. La comparaison n’est donc pas dénuée de sens. Si la pente de crosse et le compensateur de relèvement font une grande partie de la différence, la cadence de tir et la différence de poids (3,148 kg pour le Vz.58P avec son chargeur aluminium et 3,656 kg pour l’AKM avec chargeur acier nervuré comme à l’écran) ne sont pas étrangères au comportement de l’arme.
6. AK-47 & M16A1
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- AK-47 type 3 : 30 coups en 2,63 secondes, soit 683 cpm.
- M16A1 : 30 coups en 2,15 secondes, soit 837 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : l’AK-47 produit un relèvement et un recul bien supérieurs au M16A1. La chose est particulièrement palpable en début et en fin de séquence. Le M16A1 offre une excellente stabilité en rafale. Il relève légèrement en début de rafale, puis se stabilise. On note que le recul / relèvement produit par le M16A1 est léger et constant.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : l’AK-47 nécessite bien évidemment une poigne bien supérieure au M16A1, même si comme expliqué ci-après, la M16A1 nécessite une prise en main ferme. Le garde-main du M16A1 s’avère agréable pour cet exercice, même si d’un point de vue ergonomique, il n’a pas vraiment de sens ! En effet, le fait d’être épais sur sa portion arrière rend la prise en main des petits gabarits peu aisée (garde-main trop épais pour les petites mains). Bien sûr, il fait sens face à l’épaisseur du canon…mais on comprend aisément le passage au garde-main rond (et plus fin sur l’arrière) du M16A2. D’un point de vue esthétique (donc totalement subjectif), celui-ci reste mon préféré…
Sur cette comparaison : elle n’a pas de sens ! D’un point de vue contextuel, l’AK-47 est déjà sur la sortie en URSS lors de la diffusion du M16A1. D’un point de vue technique, les calibres sont très différents : calibre intermédiaire de première génération sur l’AK-47 et de seconde génération sur le M16A1. Alors pourquoi faire cette comparaison : et bien parce que si je ne la fais pas, on va me le reprocher ! Donc, c’est fait, passons à la suite.
7. AKM & M16A1
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- AKM : 30 coups en 2,73 secondes, soit 658 cpm.
- M16A1 : 30 coups en 2,15 secondes, soit 837 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : l’AKM se montre plus remuante que le M16A1 bien qu’elle descende là où le M16A1 monte très légèrement. Ainsi, lorsque la séquence se termine, le corps produit un retour en bas plus important qu’avec l’AKM : le compensateur a ici fait pleinement office, il limite l’effort musculaire à produire pour compenser le relèvement de l’AKM.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme énoncé précédemment, effectivement, aussi bizarre que cela puisse paraitre, le relèvement du M16A1 demande plus de « poigne » que celui de l’AKM. Ainsi, l’AKM pardonnera plus facilement une erreur sur cet exercice. De plus, à l’instar du Vz.58P, la cadence de tir élevée n’aide pas dans l’exercice : le corps (cerveau compris !) apprécie qu’on lui laisse du temps pour conduire les opérations. Attention, le M16A1 reste très maniable pour cet exercice, comme la plupart des fusils d’assaut chambrés pour une munition intermédiaire de seconde génération.
Sur cette comparaison : elle fait sens d’un point de vue contextuel, mais pas d’un point de vue technique. Au moment où le M16A1 se diffuse dans l’armée américaine, l’AKM est l’arme en service en URSS. D’un point de vue technique, la comparaison entre deux armes tirant des munitions intermédiaires de générations différentes aboutit à un écueil évident : la munition intermédiaire de première génération produit un recul supérieur à celui de seconde génération. Et pour cause, les niveaux d’énergie sont différents :
- À 991 m/s, le projectile de 3,5 g de la 5,56×45 M193 développe 1719 joules à la bouche du M16A1
- À 715 m/s, le projectile de 8,0 g de la 7,62×39 M43 développe environ 2045 joules à la bouche d’une AK-47 ou d’un AKM. Soit près de 18,9% de plus que la M193.
Contrairement à certaines croyances, le AKM est « seulement » plus lourde d’environs 200 g que le M16A1 (06% de plus).
Et pourtant, l’AKM s’en sort très bien.
8. M16A1 & AK-74
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- M16A1 : 30 coups en 2,15 secondes, soit 837 cpm.
- AK-74 : 30 coups en 2,62 secondes, soit 688 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : si les deux armes sont très stables, l’AK-74 se montrant plus remuante que le M16A1. Plusieurs facteurs participent à cette constatation :
- La répartition des masses mobiles en mouvement, mieux réalisée de façon objective dans la famille AR-15 (dont le M16A1 fait partie) que dans la Kalashnikov, car dans la ligne dans l’axe du canon et de l’épaule. On note ici que les masses des ensembles-mobiles sont ici très proches : pesé à 471 g sur le M16A1 (amortisseur compris, bien entendu) et 484 g sur l’AK-74…soit seulement environs 2,8% de plus pour l’AK-74 ! Pour mémoire, l’ensemble mobile de l’AKM de cet essai a été pesé à 499 g.
- La différence de pas de rayure : 1 :300 mm pour le M16A1, 1 :200 pour l’AK-74. Cette différence a nécessairement un impact sur le roulis de l’arme. Pour mémoire, les projectiles sont de masses similaires : 3,5 g pour la M193, 3,42 g pour la 7N6.
- La mise en butée de l’ensemble mobile : réalisée sur un amortisseur en matière synthétique sur le M16A1…et acier sur acier dans l’AK-74 ! On note que la course de l’ensemble mobile est supérieure sur l’AK-74 : 108 mm pour le M16A1 contre 132 mm pour l’AK-74. Ceci explique en partie la différence de cadence de tir.
Cependant, en fin de tir, le canon de l’AK-74 reste quasiment en ligne là où celui du M16A1 plonge légèrement : le dispositif de bouche de l’AK-74 a fait son office.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme suggéré par la fin de la séquence de tir, AK-74 demande un effort moindre que le M16A1. Comme évoqué précédemment, l’AK-74 pardonne réellement le mauvais positionnement (sans exagération, bien évidemment…) et ne produit pas de relèvement ou d’abaissement excessif. Le M16A1 demande une prise en main plus « virile » …
On peut s’interroger ici sur la différence induite par la différence de puissance de munitions :
- À 991 m/s, le projectile de 3,5 g de la 5,56×45 M193 développe 1719 joules à la bouche d’un M16A1.
- À 900 m/s, le projectile de 3,42 g de la 5,45×39 7N6 développe environ 1385 joules à la bouche d’une AK-74.
Le M193 tiré dans un M16A1 produit ainsi à la bouche une puissance supérieur de 24,1 % à la 7N6 à la bouche de l’AK-74 !
À titre indicatif, à 948 m/s, le projectile de 4,0 g de la 5,56×45 SS-109 développe environ 1797 joules à la bouche d’un M16A2. Ces différences de puissance ont nécessairement une conséquence sur le recul. Quant à l’efficacité de la munition, c’est un autre débat, mais rappelons simplement que le projectile doit être capable de rapidement transmettre son énergie à la cible pour être efficace, et ceci dans une plage de distance compatible avec l’usage envisagé de l’arme. Réduire l’évaluation balistique terminale / lésionnelle des munitions à des tirs à 5 m est un non-sens pratique.
Sur cette comparaison : comme celles AK-47 /AKM, AK-47 / VZ.58P et AKM / Vz.58P, elle est plutôt pertinente, car elle se fait entre deux fusils d’assaut de calibres intermédiaires de seconde génération. Mais il faut bien prendre conscience que d’un point de vue contextuel, le couple M16A1 / 5,56×45 M193 a essuyé les plâtres pour les autres fusils d’assaut de cette génération. De plus, soulignons encore ici que la qualité de tir (comportement de l’arme, précisions) du M16A1 est indéniablement bonne…le problème est ailleurs…mais ceci est une autre histoire !
9. AK-74 & AKS-74u
Cadence de tir mesurée sur la séquence :
- AK-74 : 30 coups en 2,62 secondes, soit 688 cpm.
- AKS-74u : 45 coups en 3,82 soit 707 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : les deux armes sont stables. Cependant, de façon « surprenante », l’AK-74 se montre plus remuante que l’AKS-74u. La différence de comportement semble être principalement liée au « roulis » de l’arme. Comme déjà mentionné, ce roulis semble majoritairement imputable à la mise en rotation du projectile à l’intérieur du canon : la présence du projectile dans le canon étant plus de deux fois plus longue dans le canon de l’AK-74 que dans l’AKS-74u. De même, le projectile de 3,42 g n’atteint que 735 m/s dans le canon de 206,5 mm de l’AKS-74u pour une énergie à la bouche de moins de 924 joules, soit environ 34% de moins que dans un AK-74. En contrepoint, l’AKS-74u est plus légère que l’AK-74.
Cependant, en fin de tir, l’AKS-74u plonge plus que l’AK-74 : il n’y a pas de compensateur de relèvement !
On note de façon annexe, un retour gazeux par la chambre à chaque tir sur l’AKS-74u (Photo 23). La chose (liée entre autres choses au dispositif de bouche de l’AKS-74u) étant traité dans une article dédié en lien ici, nous ne nous étendrons pas d’avantage sur le sujet (Photo 24).
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme suggéré par la fin de la séquence, l’AKS-74u demande plus de poigne que l’AK-74. Cependant, l’arme reste parfaitement maitrisable.
Sur cette comparaison : Elle est intéressante, car elle permet la comparaison entre un FAFusil d'Assaut More « classique » et une version « compacte »…voire même «sub-compacte» car dotée d’un canon long de seulement 206,5 mm, ce qui permet un tour complet de rayure (hasard ? Je ne crois pas…le pas de rayure de l’AKS-74u est spécifique à l’arme). Sur les armes de calibre intermédiaire de seconde génération, les modèles à canon court testés par votre serviteur à ce jour se sont toujours avérés très maitrisables…et parfois plus que leurs versions à canon long ! La raison en est simple : de façon analogue à la vitesse du projectile, l’impulsion de recul de l’arme est fonction inverse de la longueur du canon. Il faut cependant incorporer dans ce calcul un autre facteur : celui du poids de l’arme. Si le raccourcissement du canon conduit à un allégement de l’arme, alors la vitesse de recul se trouve augmentée.
Enfin, pourquoi avoir opté pour un chargeur de 45 coups pour l’AKS-74u. Et bien…pour le plaisir ! Ça ne change pas les constatations même si bien évidemment, une capacité de chargeur identique aurait permis de visualiser plus aisément la différence de cadence de tir, finalement minime.
10. AKM & M21A
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- AKM : 30 coups en 2,73 secondes, soit 658 cpm.
- M21A : 30 coups en 2,79 secondes, soit 645 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : le comportement des deux armes est étonnamment similaire. Le M21A produit une descente légèrement supérieure sur les premiers coups à l’AKM. Notons que tout comme l’AKM, le M21A dispose d’un compensateur de relèvement : son dispositif de bouche est constitué d’un cache-flamme fermé sur sa portion inférieure (Photo 25). En fin de tir (quasi simultané sur la séquence !), les mouvements des armes sont très proches. Les panaches de fumée sont assez différents : celui du M21A ayant une tendance plus grande à partir vers le bas que celui de l’AKM qui tend à se propager vers le haut.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : le M21A me demande un effort supérieur pour la maitrise de la rafale longue par rapport à l’AKM. Mais ici, le problème semble bien venir de votre serviteur : mon gabarit est globalement inadéquat pour cette arme…je suis trop…trapu ! En effet, la poignée-pistolet se trouve à une distance trop importante par rapport à la longueur de mon bras et ainsi, mon coude se retrouve « flottant », ce qui induit une mauvaise position de tir, mais, en l’espèce, inhérente au couple arme / tireur.
Sur cette comparaison : originellement, la comparaison de deux armes de calibres différents, mais d’une mécanique similaire – pour ne pas dire identique – peut faire sens. Cependant, ce qui surprend c’est le comportement du M21A, qui n’est pas franchement plus « stable » qu’un AKM…dans les mains de votre serviteur ! En effet, il serait intéressant de réaliser le même comparatif avec un tireur plus grand qui servirait sans doute mieux l’arme. Enfin, restons rationnel, l’arme reste maitrisable, mais son gabarit fait d’elle – sans l’ombre d’un doute – l’arme du panel que j’ai le moins bien en main. L’arme la moins maîtrisable dans cet exercice reste le Vz.58P…ne pas confondre prise en main et comportement au tir !
Enfin, il est à noter que le M21A est l’arme la plus lourde du panel.
11. M16A1 vs M21A
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- M16A1 : 30 coups en 2,15 secondes, soit 837 cpm.
- M21A : 30 coups en 2,79 secondes, soit 645 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : le comportement des deux armes est extrêmement similaire, bien que le M21A se montre plus « remuant ». Elle imprime un roulis plus important…peut-être (sans doute ?) dû à la différence de pas de rayure et de la masse du projectile : 1 :305 mm pour le M16A1 avec un projectile de 3,5 g, 1 :178 mm pour le M21A avec un projectile de 4,0 g. Ainsi, la mise en rotation est plus rapide dans le M21A avec un projectile plus lourd. De plus, les constatations sur les masses-mobiles en mouvement faites précédemment (M16A1 & AK-74) restent valable ici. On note en fin de séquence que les deux armes plongent vers l’avant, et que le M16A1, plonge un peu plus vers le bas. La cause est simple : le dispositif de bouche du M21A fait son office de compensateur de relèvement et soulage les efforts à faire. Les panaches de fumée traduisent bien le travail du dispositif de bouche : celui du M16A1 se propage de façon uniforme à la sortie du canon, celui du M21A part majoritairement vers le haut. Profitons-en pour signaler un double effet « Kiss-Cool » : dans les environnements poussiéreux, le cache-flamme ouvert sur le bas soulève la poussière à chaque tir, ce qui, en fonction du vent, peut s’avérer véritablement problématique…comme nous l’avons déjà expérimenté sur différents champs de tir en différentes saisons. Avec un cache-flamme fermé sur sa portion inférieure, le problème est souvent amoindri quand il n’est pas supprimé.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme évoqué dans les comparaisons précédentes, la prise en main du M16A1 (je ne parle pas ici de l’ergonomie des commandes de l’arme !) est nettement plus agréable dans mon cas que celle du M21A. La maitrise du M16A1 m’est ainsi, bien plus agréable que celle du M21A.
Sur cette comparaison : La comparaison entre deux armes en 5,56×45 à canon long fait nécessairement sens bien qu’ici, les munitions employées (et dévolues à chaque arme) soit différentes. Et on remarque ici que le comportement des deux armes est finalement très proche en dépit d’une mécanique et d’une ergonomie très différentes.
12. AK-74 & M21A
Cadence de tir mesurée sur la séquence:
- AK-74 : 30 coups en 2,62 secondes, soit 688 cpm.
- M21A : 30 coups en 2,79 secondes, soit 645 cpm.
Ce qui est visible sur la vidéo : Les deux armes sont remuantes, mais restent dans l’axe. Les premiers coups tirés offrent un comportement similaire : les deux armes disposent d’un compensateur de relèvement. En fin de séquence, le M21A plonge plus vers l’avant que l’AK-74 : rien de plus normal, l’arme ne dispose pas de frein de bouche en plus d’employer une munition plus puissante.
Ce qui n’est pas visible sur la vidéo : comme déjà pressenti précédemment, l’AK-74 reste le FAFusil d'Assaut More testé le plus aisé à maîtriser pour cet exercice. Le M21A reste maîtrisable, mais une fois encore, reste moins tolérant face à l’erreur de positionnement, surtout pour un petit gabarit.
Sur cette comparaison : la comparaison est intéressante, mais pas parfaite. Il aurait été plus intéressant de comparer AK-74M (5,45×39) et AK-101 (5,56×45), c’est-à-dire deux armes dont seul le calibre est différent…mais il nous faut faire avec ce que nous avons à disposition !
En conclusion
Loin de nous permettre de décerner une palme à l’une des armes testées, cet exercice de comparaison multiple nous permet une réflexion générale sur le sujet qui nous paraît appréciable. Pourquoi ne pas remettre une palme ? Tout simplement parce que l’évaluation d’une arme ne se réalise pas uniquement sur un seul de ses aspects ! Nous n’avons par exemple aucunement évoqué ici les questions de fiabilité, de précision, d’entretien de ces armes, des points qui sont au moins (voire plus pour certains) aussi importants que le comportement de l’arme au tir, sujet de ce travail. Autant de critères qui ne peuvent d’ailleurs s’évaluer que dans le cadre d’un besoin dûment qualifié : un bon fusil d’assaut d’infanterie n’est pas nécessairement le même qu’un bon fusil d’assaut pour un groupe d’intervention. Plutôt qu’un jugement, nous proposons ici de développer une réflexion sur ce sujet, une réflexion propre à chacun ! Une réflexion utile pour comprendre les travaux entrepris sur des armes atypiques comme le HK G11 (dont la cartouche sans étui n’était pas le seul enjeu), l’AN-94 « Abakan », ou enfin les AEK-971, AK-107 et 108.
Arnaud Lamothe
Bibliographie :
« The world’s assault rifles », G.P. Johnston et T.B. Nelson. Ironside International Publisher Inc. Ce livre nous a fourni les données numériques théoriques utilisées (masse des armes, vitesse initial, cadence de tir théorique, longueur de canon).
« AK-47 : The Grim Reaper », seconde edition, Frank Innamico, Chipolte Publishing LLC.
“Kalashnikov : The Arms and the Man”, Eduard Clinton Ezell, Collector Grade Publications.
“Soviet Small-Arms and Ammunition”, David Naumovich Bolotin, Finnish Arms Museum Foundation.
“Kalashnikov”, John Walther, Greenhill Military Manuals.