M16 / M16A1 : ma petite analyse…
Le 28 Février 1967, l’US Army adoptait officiellement le M16A1. Trois ans plus tôt, l’US Air Force avait adopté le M16. Dérivé de l’Armalite Rifle N°15 (AR-15) ces deux armes très semblables furent résolument modernes – et même révolutionnaires – en leur temps tout en étant médiocres techniquement. Nous analyserons ici ces différents aspects, ainsi que les raisons de l’adoption de cette arme si controversée par une des plus grandes armées du monde.
La révolution
Elle ne vient pas réellement de l’utilisation importante d’alliage d’aluminium dans la construction de l’arme : boîtier inférieur et supérieur principalement, les deux pièces les plus massives. D’autres armes avaient déjà utilisé ces matériaux, que ce soit à titre expérimental (MP-38(L) Allemand), anecdotique (CSRG 1915 Français, le « Chauchat » possède un manchon autour du canon en aluminium…comme sur une PGM Ultima Ratio !) ou pour de la fabrication en série (le massif couloir d’alimentation des mitrailleuses Maxim PM 1910 Soviétiques fut construit en bronze puis en aluminium pour des raisons d’économie évidentes). De même, l’AR-10, ancêtre direct de l’AR-15 et conçu tout comme ce dernier chez ArmaLite avait déjà implanté dans le paysage armurier ce type d’arme au milieu années 1950. Et soyons rationnels : l’utilisation de l’aluminium présente avant tout un avantage pour l’industriel : fabriquer une carcasse d’AR-15 en alliage d’aluminium forgé / usiné est bien moins onéreux qu’une carcasse en acier forgé / usiné. Ceci permet de réduire les coûts de façon significative notamment sur des échelles de production limitées (quelques milliers d’armes). À très grande échelle (plusieurs dizaines de milliers d’armes), le comparatif avec l’usage de la tôle emboutie peut cependant questionner. À titre personnel, l’utilisation de la tôle nous paraît globalement plus avantageuse, car plus économe en matières premières, et sans doute plus rapide en termes productiques, notamment avant l’invention des machines CNC (à la fin des années 1970). Il est souvent mis en avant que pour l’utilisateur, ce choix induit un gain de poids d’une importance majeure. Mais, il faut également relativiser la chose : si l’AR-15 est souvent décrit comme étant extrêmement léger, un rapide comparatif à notre balance donne le ton (par ordre décroissant) :
- AKM, avec chargeur de 30 coups en acier nervuré (tôle de 0,9 mm) vide, 3,656 kg (+ 209 g que le M16A1)
- AKM, avec chargeur de 30 coups AG-4 (acier / synthétique) vide : 3,584 kg (+ 137 g que le M16A1)
- AKM, avec chargeur de 30 coups en aluminium vide, 3,523 kg (+ 76 g que le M16A1)
- M16A1, avec chargeur de 30 coups aluminium vide : 3,447 kg
- AK-74, avec chargeur de 30 coups AG-4 (acier / synthétique) vide : 3,406 kg (- 41 g que le M16A1)
- Vz.58, avec chargeur de 30 coups aluminium vide : 3,149 kg (- 298 g que le M16A1)
Rappelons que le Vz.58 est fabriqué à partir d’une carcasse en acier forgé / usiné et emploie un piston non attelé plus que massif ! Ça casse le mythe… Certes, le M16A1 dispose d’un canon plus long d’environ 9 cm que les autres armes : mais est-ce vraiment une qualité compte tenu du rendement balistique de la 5,56×45 mm et face aux problématiques d’encombrement ? Tout comme l’utilisation de l’aluminium, celle de matériaux synthétiques pour la fabrication des garnitures était moderne, mais non révolutionnaire.
La révolution ne vient pas non plus de l’utilisation d’un verrouillage rotatif à 7 tenons en tête verrouillés dans une noix vissée directement sur le canon : l’ensemble du verrouillage est directement hérité des systèmes développés par Melvin Johnson (avec ses fusils et FM modèle 1941 – Photo 04). Il est d’ailleurs nécessaire de rappeler que ce dernier fut par ailleurs un consultant particulièrement actif chez Armalite au moment de la mise au point de l’AR-10. De quoi relativiser la « géniale inventivité » d’Eugene Stoner… D’autres feraient un parallèle ici avec la présence de Hugo Schmeisser en URSS (et vraisemblablement à Ishvesk) à l’époque de la finalisation de l’AK-47… Et pourtant, il y a plus de points communs entre un Stg-44 et un AR-15…qu’avec une AK-47 ! Mais c’est une autre histoire… À titre personnel, nous ne croyons pas du tout à un éventuel apport de Hugo Schmeisser dans la conception de l’AK-47 : il n’y a simplement pas grand-chose d’Allemand dans l’arme Soviétique !
La révolution ne vient pas de l’utilisation tout à fait médiocre (je divulgache un peu – tabernacle ! – la suite de l’article…) de l’emprunt de gaz par tube adducteur. Le système par tube adducteur était utilisé – plus intelligemment – sur d’autres armes auparavant telles que les AGM-42 Suédoises et la famille des FSA MAS en France. Mais nous reviendrons plus en détail sur les points mécaniques plus loin.
La vraie révolution vient du calibre : le 5,56×45 mm, baptisé sobrement alors « 5.56 » par l’administration États-Unienne à son adoption et .223 Remington par ses concepteurs civils (Photo 05). Un article détaillé (notamment sur les plans techniques et normatifs) sur ce sujet étant disponible sur ce même site (en lien ici), nous allons nous limiter ici à l’analyse des implications tactiques de ce choix. L’adoption du « 5.56 » marque un tournant de l’armement petit calibre, car il s’agit du premier calibre intermédiaire de seconde génération adopté par une armée majeure…et même à notre connaissance par une armée tout court. Pour rappel, les calibres intermédiaires de première génération sont généralement issus d’une réduction de puissance (par réduction des poids du projectile et de la charge propulsive, et par conséquent de la dimension de l’étui) des calibres de guerres déjà en service jusqu’au début de la Seconde Guerre mondiale : on peut citer notamment pour les plus connus :
- Le 7,92×33 mm Kurz Allemand. (Le calibre du « Strumgewehr »)
- Le 7,62×39 mm Soviétique. (Le calibre des RPD-44, SKS-45, AK-47 et AKM)
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